Le FMI a accordé mercredi au Pakistan un plan d'aide de 6,7 milliards de dollars qui s'annonce périlleux dans un contexte de fragilité économique accrue, environ deux ans après l'interruption d'un précédent programme d'assistance.
Après plusieurs mois de négociations, le Fonds monétaire international a donné son feu vert à ce nouveau programme étalé sur trois ans et dont le versement sera soumis, conformément aux règles de l'institution, à des évaluations trimestrielles, selon un communiqué.
Islamabad pourra toutefois bénéficier dès à présent d'un premier prêt de 540 millions de dollars qui apporteront une bouffée d'oxygène aux autorités, quelques mois après l'arrivée au pouvoir du Premier ministre Nawaz Sharif dans le cadre de la première transition démocratique du pouvoir du pays.
"Le programme d'aide devra aider l'économie (pakistanaise) à rebondir, prévenir une crise de la balance des paiements, reconstruire ses réserves de change et réduire le déficit budgétaire", récapitule le conseil d'administration du FMI, qui représente ses 188 Etats membres.
Le temps presse. La détérioration de l'économie pakistanaise a conduit à revoir nettement en hausse les besoins du pays en l'espace de deux mois. Début juillet, les équipes du Fonds avaient donné leur pré-accord pour une ligne de crédit de 5,3 milliards, soit 1,4 milliard de moins que le plan annoncé mercredi.
Les autorités pakistanaises avaient alors assuré n'avoir d'autre choix que faire appel au FMI afin d'éviter un défaut de paiement sur la dette du pays. "Nous ne faisons pas l'aumône, pas plus que nous ne demandons un don. Le Pakistan est membre du FMI", avait commenté le ministre des Finances Ishaq Dar.
Croissance atone
Depuis plusieurs années, la croissance économique ralentit au Pakistan en dépit de besoins criants en termes de développement. Le produit intérieur brut (PIB) a crû de 3,7% en 2012 et devrait décélérer cette année (3,5%) comme en 2014 (3,3%), selon les dernières prévisions en date du FMI.
Le déficit budgétaire s'est par ailleurs nettement creusé pour atteindre près de 9% en 2012 et la monnaie nationale a récemment plongé face au dollar, renchérissant le coût des importations de pétrole, à mesure que les investisseurs retirent peu à peu leurs fonds des pays émergents.
"La croissance (...) est bien inférieure à ce qui est nécessaire pour fournir des emplois à une population active émergente et pour réduire la pauvreté", notaient les experts du Fonds début juillet.
La situation politique au Pakistan ne devrait pas faciliter la tâche du FMI. "Cela va être un programme extrêmement compliqué à superviser pour le FMI", indique à l'AFP Jacob Funk Kirkegaard, économiste au Peterson Institute de Washington.
"L'armée continue d'avoir un rôle très important (...), y compris sur les questions économiques, et il est très improbable qu'elle s'inspire des réformes demandées par le FMI", ajoute-t-il.
Le Pakistan ne réveille pas que des bons souvenirs au FMI. En 2011, un plan d'assistance financière de plus de 11,3 milliards de dollars avait été interrompu trois ans après son début en raison du refus des autorités d'appliquer les réformes exigées par le Fonds, jugées trop draconiennes.
Selon le site internet du Fonds, le Pakistan doit d'ailleurs rembourser près de 4 milliards de dollars au Fonds, principalement au titre de ce plan d'aide.
Les tensions géopolitiques autour du Pakistan, voisin de l'Afghanistan, et ses retombées sur le pays empêchent encore de "bâtir" une politique économique, selon M. Kirkegaard.
"Si le Pakistan n'était pas une puissance nucléaire, les grandes puissances au conseil d'administration du FMI seraient sans doute moins pressées de faire tout leur possible pour stabiliser la situation là-bas", avance-t-il.