Budget serré, moral au plus bas, ombre du chômage: la crise est là, mais les Français refusent de réduire leurs dépenses en smartphones, tablettes et abonnements internet, selon une étude du Crédoc publiée mardi.
"Depuis 30 ans, le moral de la population n'a jamais été aussi dégradé" et deux personnes sur trois "déclarent s'imposer régulièrement des restrictions sur plusieurs postes de leur budget", indique en préambule le Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie.
Et pourtant, "il est frappant de constater que les consommateurs parviennent à dégager des marges de manœuvre pour financer leur acquisition d'équipements électroniques et les abonnements téléphoniques et internet afférents", selon cette enquête intitulée "Conditions de vie et aspirations des Français".
Elle a été menée en juin auprès de 2.215 personnes interrogées en "face à face" à leur domicile, âgées de 12 ans et plus, et selon la méthode des quotas.
Ainsi, les équipements en ordinateur, téléphone fixe, mobile, tablette ainsi que les abonnements internet, téléphonie et télévision sont en nette progression: 83% des 12 ans et plus disposent d’un ordinateur à domicile, et 81% sont connectés à internet (+2 points et +3 points respectivement en un an).
Et 36% possèdent même plusieurs ordinateurs dans leur foyer (+1 point). La progression de l'équipement en tablettes tactiles est lui "spectaculaire" et a plus que doublé en un an, passant de 8% à 17%.
De même, 91% des personnes résidant en France disent posséder un téléphone fixe, et une proportion maintenant presque équivalente détient un téléphone portable (89%, +1 point).
"Ici aussi, les nouveaux outils affichent une croissance qui détonne par rapport au contexte: 39% des Français sont équipés d'un smartphone en 2013, contre seulement 17% il y a deux ans", souligne le Credoc.
Inégalités numériques réduites
Lorsqu'on cumule les différentes possibilités de se connecter à internet - à domicile, avec son mobile, un ordinateur ou une tablette, dans un lieu public ou au travail - "on dénombre finalement 82% de la population qui utilisent internet en juin. Rappelons qu'en 2005, seule une personne sur deux était internaute".
Le Credoc indique que les personnes qui n'utilisent pas internet appartiennent à des catégories bien spécifiques : 78% d'entre elles ont plus de 60 ans, 90% n'ont pas le Bac et 44% disposent de revenus inférieurs à 1.500 euros par mois dans leur foyer.
"Les inégalités numériques se sont réduites, mais les personnes qui n'ont pas accès à internet apparaissent de plus en plus marginalisées par rapport à une tendance sociétale majeure", résume l'étude.
"La +fracture numérique+ au sens où on l'entendait dans les années 90, c'est-à-dire la fracture en termes d'équipement, s’est considérablement résorbée", a commenté la ministre déléguée à l’Économie Numérique Fleur Pellerin, dans un entretien au quotidien 20 Minutes.
"La question du débit internet ou de l'accès des territoires à la fibre optique a remplacé celle de savoir si on possède un ordinateur ou si on a les moyens de payer un abonnement. Le débat se déplace", souligne-t-elle.
La ministre estime cependant qu'une "nouvelle fracture pourrait s'ouvrir très vite", du fait qu'"une partie de la population ne sache pas décoder l'univers du numérique et d'internet". Elle plaide ainsi pour "de la pédagogie sur les usages pour que les utilisateurs sachent à quoi ils s'exposent".
Cette enquête a été réalisée à la demande de l'Autorité des télécoms (Arcep) et du Conseil général de l'économie, de l'industrie, de l'énergie et des technologies (CGEIET, une instance rattachée à Bercy).