Face aux soupçons américains d'espionnage, le géant chinois Huawei a profité du Mobile World Congress (MWC) de Barcelone, la grand-messe des télécoms, pour lancer une vaste contre-attaque médiatique.
Dès dimanche, Huawei a frappé fort en répondant au numéro un mondial du secteur, Samsung (KS:005930), avec la présentation de son nouveau smartphone pliable, le Mate X.
Il a ensuite enchaîné les points presse et les interviews après plusieurs mois où la discrétion était de mise.
"Nous devons être plus transparents et cela passe par le fait de nous adresser plus souvent à vous", a ainsi expliqué lundi à la presse le président de Huawei pour l'Europe de l'ouest, Vincent Ping.
Le point d'orgue de cette offensive a été la conférence mardi d'un des présidents tournants de Huawei, Guo Ping, où il a battu en brèche les accusations des Etats-Unis, selon qui les équipements du groupe chinois pour les futurs réseaux 5G pourraient être utilisés par Pékin à des fins d'espionnage.
Alors que l'affaire exacerbe les tensions diplomatiques entre Pékin et Washington, le ministère américain de la Justice a dévoilé fin janvier 13 chefs d'inculpation à l'encontre du groupe et de sa directrice financière, Meng Wanzhou, arrêtée au Canada à la demande des enquêteurs américains.
- Aucune preuve -
"Les accusations américaines concernant la sécurité de nos équipements 5G ne reposent sur aucune preuve", a déclaré Guo Ping, en assurant que "Huawei n'a jamais installé et n'installera jamais de +backdoor+ (porte de derrière) et n'autorisera personne à le faire sur (ses) équipements".
Un point sur lequel le géant chinois a reçu le soutien d'opérateurs mais également de délégations officielles à Barcelone.
sécurité est un sujet important, pour peu que les accusations soient prouvées. Mais, pour l'heure, nous n'entendons que des spéculations au sujet de Huawei de la part des Etats-Unis", a ainsi déclaré à l'AFP le ministre malawite de l'information et de la communication, Henry Mussa.
Washington a envoyé une délégation arpenter le MWC afin de convaincre les opérateurs des risques représentés par Huawei. Mais les arguments n'ont pas convaincu, certains opérateurs européens expliquant, sous couvert d'anonymat, qu'ils étaient faibles.
"Tout ce qu'ils avancent, c'est cette histoire de robot volé à T-Mobile en 2014, ils ne donnent pas plus d'éléments", a ainsi indiqué l'un d'eux.
"Leur approche est une insulte à notre industrie", a fulminé pour sa part dans un entretien à l'AFP le directeur général de Turkcell, Kaan Terzioglu, "nous savons réaliser des tests et protéger nos réseaux, depuis toujours".
- Dizaine de contrats -
Pour prouver que ces accusations n'avaient pas eu d'impact sur ses affaires, Huawei a annoncé durant le MWC une dizaine de contrats et partenariats avec des opérateurs, notamment suisse, saoudien ou sud-coréen.
Reste que le groupe n'a pas réussi à faire bouger les opérateurs américains. Selon plusieurs sources, ces derniers se seraient même plaints auprès de la GSMA, l'association mondiale des opérateurs, de la publication par cette dernière avant le Congrès d'un communiqué semblant prendre position pour Huawei, sans leur avis.
Plusieurs observateurs du marché ont par ailleurs mis en avant durant le salon que AT&T était lancé dans l'opération de rachat de Time Warner et que Sprint et T-Mobile tentaient de fusionner et n'avaient donc aucun intérêt à se mettre l'administration Trump à dos.
Alors que la qualité de la technologie proposée et le prix restent les deux éléments pris en compte par les opérateurs, Huawei a largement ouvert son énorme stand afin de montrer son expertise de la 5G.
"Je suis très satisfait de ce que Huawei nous fournit et je ne traite pas différemment un fournisseur selon son origine. Notre stratégie est de faire jouer la concurrence, nous travaillons principalement avec Huawei et Ericsson (ST:ERICb) et en sommes très satisfaits", insiste Kaan Terzioglu.
"Huawei est très agressif et ils ont pris une longueur d'avance sur leurs concurrents, ce qui est une bonne chose de mon point de vue. Mais nous prenons les questions de sécurité au sérieux et avons besoin que des pays comme les Etats-Unis nous montrent les problèmes afin de nous aider dans nos décisions", insiste le ministre malawite, Henry Mussa.