La chasse aux fraudeurs du fisc, un véritable fléau en Italie, ne connaît pas de trêve depuis l'arrivée au pouvoir du chef de gouvernement Mario Monti, même si des progrès restent encore à faire contre cette plaie affectant les rentrées fiscales de la péninsule.
Au centre opérationnel de la brigade financière de Rome, installé dans un immeuble anonyme en périphérie, des policiers en uniforme se relaient 24 heures sur 24 pour répondre aux appels de particuliers désireux de signaler toutes sortes d'arnaques au fisc.
En appelant un numéro unique, le 117, tout citoyen peut signaler l'absence de tickets de caisse dans un restaurant ou une boutique, ou encore la non-déclaration de loyers par un propriétaire indélicat.
Les appels à ce numéro vert sont en hausse constante, signe que les temps changent: "A Rome, nous sommes passés de 6.500 appels en 2010 à 7.400 en 2011, puis 8.200 sur les 10 premiers mois de 2012", confie à l'AFP le colonel Davide Cardia, chef du centre opérationnel de la brigade financière de la capitale italienne.
Au niveau national, la hausse est encore plus marquée: +91,5% entre 2011 et 2012 sur les neuf premiers mois de l'année! "Il y a donc une croissance exponentielle, que nous avons notée tout particulièrement depuis l'automne 2011", se réjouit le colonel.
Dès son arrivée à la tête du gouvernement en novembre 2011, Mario Monti a décidé de faire de la lutte contre la fraude fiscale son cheval de bataille, une obligation alors que l'Italie se trouvait et se trouve encore sur la sellette en raison de sa dette colossale.
"L'Italie est un pays où le taux de fraude fiscale est très élevé, et ce depuis très longtemps. Les chiffres ne sont pas sûrs à 100%, mais selon les estimations, on serait à environ 20% du PIB, un chiffre considérable", analyse Maurizio Franzini, professeur de politique économique à l'Université romaine de La Sapienza.
L'an dernier, le fisc italien a réussi à récupérer 12,7 milliards d'euros, un chiffre en hausse de 15% par rapport à 2010, mais il lui reste encore beaucoup de chemin à faire pour s'aligner sur les standards internationaux.
"Les grands fraudeurs sont ceux qui envoient leur argent dans les paradis fiscaux", observe le Pr Franzini.
"Il faudrait donc travailler au niveau international pour réduire les privilèges accordés par les paradis fiscaux. C'est un problème très sérieux de politique internationale", souligne-t-il.
En attendant une attaque frontale mais bien hypothétique contre les paradis fiscaux, la brigade financière italienne multiplie les opérations coups de poing pour démasquer les fraudeurs de tous poils.
Après s'être attaquée l'hiver dernier aux fraudeurs de la très chic station de ski de Cortina d'Ampezzo (nord) (dont certains roulaient en 4X4 de luxe mais ne déclaraient aucun revenu...), la brigade a effectué cet été des descentes dans les stations balnéaires les plus courues: Forte dei Marmi, Portofino...
Les villégiatures de luxe ne sont pas les seules concernées par cet activisme. Au cours d'une opération sur tout le territoire visant les chambres d'hôtes, la brigade financière a constaté qu'environ 30% de ces structures n'étaient pas en règle avec le fisc. Un pourcentage qui montre l'ampleur de la tâche restant à accomplir.
Toutes ces opérations, très médiatisées, ont aussi pour but de changer la mentalité des Italiens, y compris à travers internet. Sur le site www.evasori.info, également disponible en application pour smartphone, il est possible de dénoncer des fraudes en deux clics. Le slogan affiché sur la page d'accueil annonce tout de suite la couleur: "Ceux qui fraudent te volent toi aussi!"