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Inquiétudes et tensions autour de la future politique économique de l'Italie

Publié le 31/08/2018 23:20
Le Commissaire européen aux Affaires Economiques Pierre Moscovici, le 22 juillet 2018 à Buenos Aires (Photo Eitan ABRAMOVICH. AFP)
BARC
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Le Commissaire européen aux Affaires Economiques Pierre Moscovici, le 22 juillet 2018 à Buenos Aires (Photo Eitan ABRAMOVICH. AFP)

Quelle sera la politique économique et budgétaire du nouveau gouvernement antisystème italien ? Depuis plusieurs semaines, les marchés financiers s'en inquiètent, provoquant une hausse des taux d'emprunt de l'Etat italien mais aussi des tiraillements au sein même de l'exécutif.

Vendredi, le Commissaire européen aux Affaires économiques, Pierre Moscovici, a demandé à Rome de réaliser un "effort important" pour son budget 2019, attendu dans les prochaines semaines, soulignant qu'il était "dans l'intérêt de l'Italie de contrôler la dette publique".

Celle-ci s'élève à 132% du PIB, le ratio le plus élevé de la zone euro derrière la Grèce.

Or, depuis son arrivée au pouvoir en juin, le nouveau gouvernement, formé de la Ligue (extrême droite) et du Mouvement 5 étoiles (M5S, antisystème), envoie des signaux contradictoires.

Les leaders des deux partis, Matteo Salvini et Luigi Di Maio, vice-Premier ministres, affirment vouloir mettre en oeuvre leurs coûteuses promesses électorales, au premier rang desquelles la "flat tax", un impôt aux taux de 15% et 20%, pour le premier, et un revenu de citoyenneté de 780 euros, pour le second.

Les deux hommes sont souvent ouvertement critiques à l'égard des contraintes budgétaires européennes.

M. Di Maio n'a ainsi pas exclu mardi que le gouvernement puisse s'affranchir de la règle européenne limitant le déficit public à 3% du PIB.

Mais le ministre des Finances, Giovanni Tria, un modéré contraint de jouer régulièrement les pompiers à Bruxelles, a ensuite assuré que Rome ne prévoyait pas de dépasser ce seuil.

Face aux deux turbulents vice-Premiers ministres, M. Tria n'a cesse de tenter de rassurer les marchés financiers, soulignant sa volonté de poursuivre la réduction de la colossale dette publique, respecter le seuil des 3% et rester dans la zone euro.

Malgré ses efforts, le quotidien Il Corriere della Sera souligne que "le déficit fait craindre le jugement de (l'agence de notation) Moody’s", prévu d'ici la fin octobre, après le "verdict de l'agence Fitch" qui était attendu vendredi.

Cette agence de notation a finalement maintenu pour le moment la note de la dette italienne à BBB tout en se montrant pessimiste sur son évolution puisqu'elle a abaissé sa perspective de "stable" à "négative".

"Après la formation d'un gouvernement de coalition, Fitch anticipe un certain relâchement budgétaire qui exposerait davantage le niveau très élevé de la dette italienne à des chocs potentiels", a-t-elle affirmé pour justifier cette décision.

Ces inquiétudes quant aux potentiels chocs se matérialisent déjà sur la hausse des taux d'emprunt italiens.

- Investisseurs 'nerveux' -

Quand Rome a levé jeudi 6 milliards d'euros, le taux brut sur cinq ans a atteint 2,44%, son niveau le plus élevé depuis fin 2013, et 3,25% sur dix ans, dépassant pour la première fois depuis mai 2014 le seuil des 3%. Et sur le marché secondaire, là où s'échangent les titres, les taux ne cessent de croître.

Or, plus les taux augmentent, plus le coût de remboursement de sa dette augmente pour l'Etat, ce qui réduit ses marges de manœuvre financières.

"Les investisseurs sont de plus en plus nerveux", souligne l'analyste Shweta Singh, du cabinet TS Lombard, en précisant que les sorties nettes de capitaux au deuxième trimestre ont atteint leur niveau le plus élevé en deux décennies. Il évoque "un cercle vicieux" qui pourrait affecter les banques italiennes, en raison de leur exposition à la dette italienne.

"L'Italie ira-t-elle à la confrontation avec l'Europe ou se montrera-t-elle plus réaliste ?", s'interroge de son côté La Stampa, qui estime que "le bon sens ferait pencher vers la deuxième hypothèse: les élections européennes sont imminentes et ni la Ligue et ni le M5S n’auraient intérêt à se présenter devant les électeurs avec un +spread+ (l'écart très surveillé entre les taux d'emprunt allemand et italien) hors de contrôle".

Selon le journal, M. Tria viserait un déficit minimum --sous lequel il refuse de descendre-- autour de 1,5% du PIB pour 2019, soit "environ dix milliards de dépenses en plus par rapport aux accords" passés. Le précédent gouvernement de centre-gauche prévoyait un déficit à 0,8%.

Les analystes de Barclays (LON:BARC) tablent sur un chiffre proche, de 1,7%, qui, s'il est inférieur aux craintes, représente néanmoins un chemin "instable", selon eux, pour réduire la dette.

Si l'objectif minimum de M. Tria "dépasse la flexibilité que l'Europe est prête à concéder (...) elle est bien loin de celle attendue par la majorité": "le président du Conseil, (Giuseppe) Conte, se prépare à jouer le rôle de médiateur", pronostique La Stampa.

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