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France: Le lourd tribut des musulmans face à la pandémie de COVID-19

Publié le 16/06/2021 13:56
Mis à jour le 16/06/2021 14:00
© Reuters. Chaque semaine, Mamadou Diagouraga (photo), 33 ans, vient se recueillir sur la tombe de son père, Boubou, emporté par la première vague de l'épidémie de Covid, en mars 2020. /Photo prise le 6 mai 2021/REUTERS/Christian Hartmann

par Caroline Pailliez et et Noémie Olive

VALENTON, Val-de-Marne (Reuters) - Chaque semaine, Mamadou Diagouraga, 33 ans, vient se recueillir sur la tombe de son père, Boubou, emporté par la première vague de l'épidémie de Covid, en mars 2020.

S'il est parvenu à faire son deuil après des moments difficiles, il réalise aujourd'hui avec effroi le nombre de victimes au sein de sa communauté à la vue des tombes du carré musulman du cimetière de Valenton (Val-de-Marne), où son père est enterré.

"Mon père était le premier ici de cette rangée et en un an, ça s’est rempli. Je regarde le cimetière et je me dis 'c’est incroyable toutes les personnes qui ont suivi'", dit-il.

La France concentre la plus grande communauté musulmane de l'Union européenne, mais impossible de mesurer l'impact de la crise sanitaire en son sein. Car contrairement aux pays anglo-saxons, elle interdit tout recueil de données basées sur l'origine ethnique ou sur la religion.

Des recherches de l'Insee, de l'Institut national d'études démographiques (Ined) ainsi que des statistiques et témoignages compilés par Reuters permettent néanmoins d'estimer que la communauté musulmane a été affectée dans des proportions importantes.

En avril, l'Insee a dévoilé une étude évaluant le nombre de décès en France en 2020 par pays d'origine. Selon cette étude, le nombre de décès a plus fortement augmenté chez les immigrés que chez les natifs.

La surmortalité a été 2,6 fois plus importante chez les personnes nées au Maghreb et 4,5 fois plus importante chez les personnes nées en Afrique subsaharienne que chez les personnes nées en France.

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"On peut en déduire qu’en effet, les immigrés de confession musulmane ont été beaucoup plus touchés par l’épidémie de COVID", a dit à Reuters Michel Guillot, chercheur à l'Ined.

Mais d'autres populations immigrées ont aussi été concernées par une surmortalité. Celle-ci a ainsi été 3,6 fois plus importante chez les personnes nées en Asie.

L'impact du COVID-19 sur les populations immigrées s'explique par des facteurs socio-économiques, selon des chercheurs. Les immigrés sont plus à même d'occuper des postes non-télétravaillables et donc d'être exposés au virus.

En Seine-Saint-Denis, le département qui compte la plus importante population immigrée en France, et où la surmortalité a été très forte entre 2019 et 2020, le niveau de vie médian est le plus faible de France métropolitaine, 20% des logements y sont surpeuplés, 70% des emplois hautement qualifiés sont occupés par des non-résidents.

FORTE DEMANDE DANS LES CIMETIÈRES

Lorsque la crise sanitaire a commencé, M’Hammed Henniche, président de l'Union des associations musulmanes du 93 (UAM93), recevait des centaines d'appels de membres de sa communauté cherchant de l'aide pour leurs proches décédés.

"Beaucoup de nos concitoyens ont pu bénéficier du télétravail mais quelqu’un qui est éboueur, femme de ménage, ou caissière ne pouvait pas travailler de chez lui. Il était obligé de sortir, d'aller au contact", dit-il à Reuters.

"Beaucoup de ces gens-là ont payé le prix très fort".

Dans les cimetières de la couronne parisienne, la demande pour des concessions dans les carrés musulmans a bondi, si bien que beaucoup ne pouvaient répondre à la demande. Peu d'entre eux disposaient d'un carré musulman.

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Les familles devaient parfois passer des dizaines d'appels pour trouver un emplacement et attendaient plusieurs semaines avant de pouvoir inhumer leur proche.

Samad Akrach, fondateur de Tahara, une association qui se spécialise dans les toilettes rituelles, a organisé plus de 764 enterrements selon le rite musulman en 2020, contre 382 en 2019. La moitié des défunts étaient décédés du COVID-19, dit-il.

"Au début du COVID, c’était vraiment une catastrophe, le téléphone n’arrêtait pas de sonner à l’association. Les familles se trouvaient dépourvues, elles ne savaient pas comment enterrer leurs défunts", dit-il à Reuters.

Selon des statistiques établies par Reuters, dans le Val-de-Marne, où est enterré Boubou Diagouraga, les inhumations effectuées dans les carrés musulmans ont augmenté de 125% entre 2019 et 2020 tandis que les inhumations toutes confessions confondues ont augmenté de 34%.

CRISE DES RAPATRIEMENTS

La demande dans les cimetières a été particulièrement forte car la plupart des familles n'ont pu rapatrier le corps de leur proche dans leur pays d'origine, comme elles en avaient l'habitude, les frontières des pays étant fermées lors de la première vague. Elles ont donc cherché en plus grand nombre à enterrer les défunts en France.

Auparavant, les trois quarts des musulmans décédés en France étaient ramenés dans leur pays d'origine, selon des pompes funèbres musulmanes françaises interrogées par Reuters.

Leïla Lacchab, 39 ans, n'a pas pu enterrer son père au Maroc comme il l'avait demandé pour être réuni avec ses deux filles décédées avant lui. Pour sa famille, c'était un crève-coeur.

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"C’est une douleur énorme. C’est un deuil qu’on ne fait pas", dit celle qui a perdu son père soudainement en décembre dernier. Comme beaucoup d'autres membres de la communauté, elle se dit prête à déterrer la dépouille pour la rapatrier au Maroc lorsque les frontières du pays rouvriront.

L'impact du COVID-19 sur les minorités a été très documenté dans d'autres pays, comme aux Etats-Unis. En France, le gouvernement indique seulement ne pas disposer "de données croisées avec la confession des personnes".

L'intérêt pour de telles informations est pourtant réel. Pour des chercheurs, les données sociales couplées aux données sanitaires permettraient d'engager des politiques publiques bien plus réactives en cas d'épidémie.

Les chercheurs ont mis plusieurs mois à observer l'impact disproportionné du COVID-19 sur les populations immigrées en France, quand il a fallu quelques semaines seulement aux Etats-Unis ou en Grande-Bretagne. Or, la question se pose encore aujourd'hui pour la vaccination.

"On a du mal à croire que l’accès à la vaccination soit la même quel que soit le groupe social", dit Cyrille Delpierre, chercheur à l'Inserm. L'enjeu est de taille : "Comment faire pour que les populations qui ont le plus besoin (du vaccin) puissent y avoir accès?".

(Édité par Blandine Hénault)

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