En invitant lundi matin à Matignon syndicats, patronat ou encore associations d'élus pour lancer sa "mobilisation générale" pour l'emploi et l'écologie, l'exécutif espère mettre en oeuvre un "changement de méthode" avec les corps intermédiaires après plus de six mois de crise sociale.
C'est l'un des virages amorcés par Emmanuel Macron à l'issue du grand débat: comment renouer avec ces corps intermédiaires qui pour beaucoup se sont sentis maltraités dans les deux premières années du quinquennat ?
L'exécutif soumet lundi un premier élément de réponse en conviant autour d'Edouard Philippe et d'une dizaine de ministres les réseaux d'élus, représentants des organisations syndicales et patronales ou encore des associations, afin de donner le coup d'envoi d'une "mobilisation nationale et territoriale autour de la formation, l'emploi, et des grandes transitions écologique et numérique".
Cette mobilisation, voulue par M. Macron en réponse à la crise des "gilets jaunes", doit tourner autour de "questions consensuelles, concrètes, qui intéressent les Français", explique-t-on à Matignon.
"Il se dit qu'on n'a pas suffisamment écouté les corps intermédiaires, nous disons donc +chiche+. Prenons tous nos responsabilités", insiste-t-on encore dans l'entourage du Premier ministre.
Concrètement, cinq chantiers ont été mis sur la table par Matignon, en laissant toutefois la possibilité aux interlocuteurs d'allonger la liste.
L'apprentissage tout d'abord, dont le gouvernement a fait la promotion pour susciter de nouvelles vocations. "Notre responsabilité, c'est comment honorer cette demande d'apprentissage", souligne-t-on à Matignon en évoquant les problématiques de logement et de transport pour les quelque 440.000 apprentis actuels.
Les questions des emplois non pourvus et des freins à la reprise d'emploi (transport, logement, garde d'enfant) seront également au menu. Dans ce cadre, s'invitera aussi le sujet plus spécifique de la prime mobilité, que certains syndicats voudraient rendre obligatoire et que le gouvernement serait prêt à défiscaliser.
Des discussions auront également lieu sur l'accompagnement des territoires dans la transition écologique et numérique, ou encore sur les gestes écologiques du quotidien (gestion des déchets, cycles courts, alimentation dans les cantines...).
- "Communication politique" -
"Ce n'est pas une conférence sociale où l'on essaye de décliner un agenda social comme on a pu faire par le passé", insiste-t-on à Matignon où l'on fait valoir qu'il s'agit surtout de s'appuyer sur les outils existants et de s'assurer "de les faire marcher" et de les faire connaître.
Lancée à Paris, cette mobilisation doit ensuite "descendre sur les territoires, dans les régions et les bassins d'emploi", pour une première salve de remontées fin juin. "On distinguera ce qui doit être traité au niveau national et ce qui doit être traité au niveau local" pour "qu'en septembre il y ait un agenda de solutions", précise-t-on à Matignon.
Reste toutefois à entraîner les corps intermédiaires. Dimanche soir, le patron de la CGT Philippe Martinez entretenait le doute sur sa participation, arguant avoir été prévenu "tardivement".
"Avec le président de la République c'est toujours pareil : +je vous invite, mais voilà de quoi on va discuter+", a-t-il lancé sur BFMTV, alors qu'il voudrait, pour sa part, aborder "plein de sujets": les "salaires", "l'augmentation du Smic", le retour de "l'ISF", "les services publics"...
"On n'a pas l'intention de s'inscrire dans une démarche de communication politique, on y va pour rappeler nos revendications", a déclaré à l'AFP le secrétaire général de Force ouvrière Yves Veyrier, en évoquant la généralisation de la prime mobilité ou le bonus-malus sur les contrats courts.
Le secrétaire général de la CFDT Laurent Berger a, lui, demandé "des réponses extrêmement concrètes" aux revendications de la centrale. Parmi celles-ci, outre la prime mobilité, "un encadrement des rémunérations dans les entreprises, des aides au logement renforcées pour les salariés ou encore un pacte de mobilité pour les jeunes".
De son côté, Solidaires a annoncé boycotter la rencontre, afin de ne pas servir de "caution" à l'"entreprise de communication" d'un gouvernement qui "maintient l'ordre social à coup de matraques, LBD, grenades, gaz lacrymogène et de fakes news".