PARIS (Reuters) - Le gouvernement a promis jeudi d'"écouter" les contestataires qui ont manifesté mercredi contre son projet de réforme du Code du travail et évoqué plusieurs pistes, qui restent cependant très en deçà des concessions demandées.
La ministre du Travail, Myriam El Khomri, a ainsi dit sur France Info que la surtaxation des contrats courts et l'abandon d'une disposition pour les apprentis étaient "sur la table".
Manuel Valls a fait savoir qu'il recevrait vendredi matin les organisations de jeunes opposées au projet et a ajouté à la liste des partenaires sociaux consultés l'Union nationale des professions libérales (Unapl).
"Le Premier ministre est à l'écoute de tous", assure son entourage au lendemain de manifestations qui ont rassemblé 224.000 personnes, selon le ministre de l'Intérieur, et jusqu'à 500.000, selon les organisateurs.
"Quel que soit le nombre de personnes, ça rend nécessaire l'écoute", a renchéri le ministre des Finances, Michel Sapin, lors d'un point presse.
La ministre du Travail a évoqué la piste d'une augmentation des cotisations patronales d'assurance-chômage pour les contrats courts mais admis que cela relevait avant tout des partenaires sociaux.
L'idée, avancée par les syndicats, est en effet déjà un des enjeux de leurs négociations avec le patronat sur une nouvelle convention d'assurance-chômage, engagées en février.
APPRENTIS
La loi du 14 juin 2013 sur la sécurisation de l'emploi, qui reprend l'accord interprofessionnel du 11 janvier 2013, tente déjà de limiter le recours à ce type de contrats précaires.
Mais la surtaxation alors mise en place n'a pas suffi à enrayer la pratique de l'alternance accélérée de périodes de chômage indemnisé et de contrats très courts, parce que "plutôt modeste" et trop partielle, a estimé Myriam El Khomri.
"Donc, en effet, dans la discussion avec les partenaires sociaux sur la nouvelle convention assurance-chômage, cette question est posée sur la table (...) La proposition existe", a-t-elle ajouté. L'objectif étant, a-t-elle précisé, d'inciter les employeurs à recruter en contrats à durée indéterminée (CDI).
La deuxième piste évoquée par la ministre concerne plus directement son projet de loi, dont ce n'est cependant pas un des principaux éléments.
Le texte prévoit que les apprentis de moins de 18 ans pourront travailler jusqu'à 10 heures par jour et 40 heures par semaine "à titre exceptionnel ou lorsque des raisons objectives le justifient", dans des secteurs déterminés par décret et après simple information de l'inspecteur et du médecin du travail.
"La possibilité de travailler 40 heures par semaine existe déjà (...) avec une autorisation de l'inspection du travail", a expliqué Myriam El Khomri. "Ce qui était proposé dans le projet de loi, c'était de rester à droit constant et de passer à un régime de déclaration."
INDEMNITÉS PRUD'HOMALES
"Cette question a provoqué des questionnements légitimes (...) et, en effet, c'est sur la table, pour retirer cette proposition", a ajouté la ministre du Travail.
La CGT, Force ouvrière et les organisations de jeunes qui ont manifesté mercredi et envisagent de nouvelles journées de mobilisation exigent pour leur part la suspension ou le retrait pur et simple de l'ensemble du texte, de même que la gauche de la gauche ou certains élus "frondeurs" du Parti socialiste.
Une grande partie du PS, dont la maire de Lille Martine Aubry et ses amis, demandent une réécriture plus ou moins complète du projet de loi, de même que les syndicats réformistes, CFDT en tête.
Un des points de blocage est le plafonnement des indemnités prud'homales pour licenciement abusif, une disposition clef pour le patronat mais dont la CFDT demande l'abandon.
"Manuel Valls n'a jamais dit que les indemnités prud'homales n'étaient pas négociables", a assuré sur Radio Classique et LCI le secrétaire d'Etat aux Relations avec le Parlement, Jean-Marie Le Guen. "On peut discuter des modalités (...) Cette mesure, ainsi que d'autres (...) peuvent évidemment bouger."
(Emmanuel Jarry, avec Elizabeth Pineau et Myriam Rivet, édité par Yves Clarisse)