par Lucia Mutikani
WASHINGTON (Reuters) - L'économie américaine a créé nettement plus d'emplois qu'attendu en juin et le taux de chômage a reculé à 6,1%, montrent les statistiques officielles publiées jeudi, qui confirment un net rebond de l'activité après un début d'année difficile.
Le département du Travail a fait état de 288.000 créations de postes non agricoles le mois dernier. Les économistes interrogés par Reuters prévoyaient en moyenne un chiffre de 212.000.
Les créations d'avril et mai ont en outre été révisées en hausse, de 29.000 au total par rapport aux chiffres annoncés précédemment.
C'est la première fois depuis le boom des nouvelles technologies de la fin des années 1990 que le rythme des créations de postes dépasse le seuil de 200.000 pendant cinq mois consécutifs.
Le dollar et les rendements des emprunts d'Etat américains étaient orientés à la hausse après ces chiffres. L'euro est ainsi brièvement retombé sous le seuil de 1,36 dollar, contre 1,3645 environ juste avant la publication des statistiques. Wall Street a ouvert en légère hausse et l'indice Dow Jones gagnait 0,23% dans les premiers échanges.
"Les chiffres sont extrêmement favorables. Ils montrent que pratiquement tous les voyants sont au vert, je ne crois pas qu'on aurait pu imaginer des chiffres encore meilleurs", a commenté Jacob Oudina, économiste senior de RBC Capital Markets.
Une partie des investisseurs s'attendaient à des statistiques solides au lendemain de l'annonce de 281.000 créations de postes dans le secteur privé en juin selon l'enquête du cabinet ADP, le chiffre le plus élevé enregistré depuis un an et demi.
Les inscriptions au chômage, elles, restent sur une tendance baissière même si, à 315.000 la semaine dernière, elles ont légèrement dépassé le consensus.
Ces bonnes nouvelles sur l'emploi s'ajoutent à des indicateurs solides sur l'activité manufacturière et les ventes de voitures publiés ces derniers jours, qui accréditent le scénario d'une reprise marquée après la chute du produit intérieur brut (PIB) subie au premier trimestre, liée avant tout à la rigueur de l'hiver.
Le PIB s'est contracté de 2,9% en rythme annualisé sur janvier-mars, ce qui a conduit à une révision en nette baisse des prévisions pour l'ensemble de l'année. Mais au second semestre, la croissance pourrait avoisiner 3,5%, toujours en rythme annualisé.
DES CHIFFRES SUIVIS DE PRÈS PAR LA FED
La baisse de 0,2 point du taux de chômage en juin a ramené celui-ci à son plus bas niveau depuis septembre 2008, le mois du dépôt de bilan de Lehman Brothers, détonateur de la crise financière mondiale. Le chômage aux Etats-Unis avait ensuite culminé à 10% en octobre 2009.
Le taux de participation au marché du travail, qui mesure la part de la population en âge de travailler occupant ou recherchant effectivement un emploi, est demeuré stable le mois dernier à 62,8%.
La proportion d'Américains ayant un emploi a atteint 59%, le chiffre le plus élevé depuis août 2009. Les Etats-Unis comptent toutefois encore 9,5 millions de sans emploi.
La tendance à l'amélioration sur le marché du travail devrait être bien accueillie par la Réserve fédérale et elle alimentera le débat sur le calendrier prévisionnel de la remontée des taux d'intérêt.
Janet Yellen, la présidente de la Fed, a mis en avant ces derniers mois l'importance des capacités excédentaires du marché du travail, en soulignant la faiblesse du taux de participation. Selon elle, cette faiblesse reflète en partie le fait que certains chômeurs ont renoncé au moins provisoirement à chercher du travail. Ce qui sous-entend qu'une amélioration de la conjoncture pourrait les inciter à reprendre une recherche active d'emploi.
La plupart des économistes ne s'attendent pas à voir la Fed relever ses taux avant la mi-2015 au plus tôt, mais les anticipations pourraient évoluer si la reprise de l'emploi s'accélère.
"La vraie question, c'est : quand commençons nous à intégrer dans les cours cette première hausse de taux ?", explique Darrell Cronk, de Wells Fargo Private Bank. "Ces chiffres font assurément pencher la balance (...) en faveur d'une échéance avancée avec l'amélioration du marché du travail."
En juin, le secteur manufacturier a créé 16.000 postes, le onzième chiffre positif consécutif. Dans la construction, les effectifs ont augmenté pour le sixième mois d'affilée et dans les services, le nombre de créations de postes a atteint 236.000, le plus élevé depuis octobre 2012.
La publication des statistiques mensuelles de l'emploi, qui a lieu habituellement le premier vendredi du mois, a été avancée de 24 heures, ce vendredi étant férié pour l'Independence Day.
(Lucia Mutikani, Marc Angrand pour le service français, édité par Wilfrid Exbrayat)