Nouvelles mobilisations de rue contre la loi travail, colère des intermittents et du patronat : c'est dans un contexte social particulièrement tendu que sont publiés mardi les chiffres de Pôle emploi à fin mars, alors que le chômage reste sur des sommets.
Les chiffres jouent au yoyo depuis juin. Après un recul en janvier, le chômage a ainsi atteint un nouveau record fin février, avec 3,59 millions de demandeurs d'emploi sans activité inscrits à Pôle emploi. C'était sa plus forte hausse depuis 2013 (+38.400, +1,1%).
Cette dégradation a affecté toutes les classes d'âge, jeunes (+0,5%) comme seniors (+0,9%), et le chômage de longue durée a continué de gagner du terrain (+0,3%).
Toujours très attendue, la publication des chiffres intervient à deux jours d'une nouvelle journée de manifestations et de grèves contre le projet de loi travail, à l'appel de sept syndicats de salariés, étudiants et lycéens (CGT, FO, FSU, Solidaires, Unef, UNL, Fidl). Cette troisième mobilisation unitaire depuis début mars sera suivie d'un 1er Mai également focalisé sur la réforme.
La précédente, le 31 mars, entre 390.00 personnes selon les autorités, et 1,2 million selon les syndicats, avaient battu le pavé pour demander le retrait du projet de loi.
La contestation anti-loi travail s'est élargie au soir du 31 mars avec le mouvement Nuit debout qui continue d'occuper la place de la République à Paris, et mobilise dans d'autres villes à travers la France.
La réforme de Myriam El Khomri vise à donner plus de souplesse aux entreprises notamment en matière d'aménagement du temps de travail, et à clarifier les règles du licenciement économique.
Le gouvernement a mécontenté à peu près tout le monde. Les détracteurs jugent le texte, même modifié, trop favorable aux employeurs et facteur de précarité pour les salariés. Le patronat, lui, reproche au gouvernement, d'avoir cédé à sa majorité.
Le président du Medef Pierre Gattaz a lancé un avertissement: il a donné trois semaines au gouvernement pour "corriger" son projet, faute de quoi il quittera la négociation sur l’assurance chômage.
- 'Ca va mieux' -
La discussion à l'Assemblée nationale commence le 3 mai.
Là-dessus est venue se greffer la grogne des intermittents du spectacle. La CGT-Spectacle et la Coordination des intermittents et précaires (CIP) refusent le cadrage financier proposé par le Medef - et signé par trois syndicats minoritaires dans le spectacle (CFDT, CFTC et CFE-CGC) - qui impose un effort de 185 millions d'euros d'économies d'ici à 2018, faisant redouter une baisse des droits.
L'emploi reste un enjeu majeur pour François Hollande. "Je demanderai à être jugé sur la question du chômage", a-t-il redit le 14 avril sur France 2.
Pour le chef de l'État, la France "va mieux". De fait, plusieurs signaux sont passés au vert ces derniers mois, à commencer par les embauches qui sont en hausse continue depuis mi-2014.
L'Acoss, organisme collecteur des cotisations de sécurité sociale, a enregistré au premier trimestre 1,87 million de déclarations d'embauches pour des contrats de plus d'un mois, un total qui flirte avec le record enregistré au troisième trimestre 2011.
Parallèlement, les entreprises du secteur privé ont créé, en net, 82.300 postes salariés en 2015, après trois années de destructions, selon l'Insee.
Tous secteurs confondus, la France a même créé 158.000 emplois, permettant au taux de chômage de l'Insee de reculer légèrement (10% en métropole, -0,1 point) en 2015. Cette baisse est toutefois en contradiction avec les 88.200 chômeurs supplémentaires recensés par Pôle emploi sur la même période.