SNCM: deux semaines de grève, les négociations démarrent enfin

Publié le 07/07/2014 12:30
Mis à jour le 07/07/2014 15:30
SNCM: deux semaines de grève, les négociations démarrent enfin

Les négociations démarrent enfin, lundi, à la SNCM, pour tenter de mettre un terme à la grève qui s'enlise depuis deux semaines, provoquant de fortes tensions en Corse, mais le négociateur de l'Etat aura fort à faire pour rapprocher des positions a priori irréconciliables.

Ce week-end, chaque protagoniste a mis ses cartes sur la table. Dans un communiqué, l'actionnaire majoritaire Transdev (66%) a, sans surprise, réaffirmé sa volonté d'en passer par le redressement judiciaire pour la compagnie maritime. Pour "bâtir un avenir stable et pérenne", la "solution passera nécessairement par une procédure judiciaire", affirme le groupe de transports.

De son côté, l'Etat (actionnaire à 25%) et à qui les syndicats demandaient de clarifier sa position, est enfin sorti du bois, en affichant clairement son soutien à cette option; par la voix du secrétaire d'Etat aux Transports, Frédéric Cuvillier, puis de Manuel Valls qui a estimé que son ministre avait "eu raison de dire la vérité".

Etat et actionnaire majoritaire considèrent en effet que ce passage au tribunal de commerce permettrait, outre d'appurer les comptes de la compagnie déficitaire, de lever l'hypothèque des lourdes condamnations européennes, noeud gordien du dossier SNCM depuis 18 mois.

L'entreprise, opérateur historique des liaisons Corse-continent, a en effet été condamnée à deux reprises par les instances bruxelloises au remboursement d'aides publiques jugées indûment perçues: 220 millions d'euros lors de la privatisation, en 2006, et 220 autres millions pour la délégation de service public (DSP), entre 2007 et 2013.

Mais les syndicats ont une lecture radicalement différente du dossier, qu'ils ont réaffirmée dimanche soir dans des lettres ouvertes à Transdev et à Manuel Valls.

Même si Transdev affirme vouloir reconstruire la SNCM sur un "périmètre le plus large possible", les organisations syndicales interprètent ce passage au tribunal comme une "disparition et un démantèlement", et affirment que les menaces bruxelloises ne sont ni réelles, ni imminentes.

"Il faudra au moins 4 ou 5 ans pour considérer un éventuel remboursement dont les montants devraient être largement minorés et ne porter que sur le contentieux de la privatisation", jugent-ils dans leur courrier au Premier ministre.

Ils demandent ainsi d'"exclure tout scénario de discontinuité" (c'est-à-dire de procédure judiciaire, ndlr), et, afin de trouver de nouveaux actionnaires, réclament une "garantie de passif" des actionnaires après épuisement des recours des recours à Bruxelles.

- Situation tendue en Corse -

Gilles Bélier, le médiateur fraîchement nommé pour gérer ce conflit, aura ainsi fort à faire pour réconcilier les parties, lundi après-midi à Marseille, lors d'une réunion à la préfecture.

Il n'y aura pas de reprise "tant qu’il n’y aura pas de garantie qu’il n’y aura pas tribunal de commerce. C’est un minimum, et après, on veut bien parler de tout", a affirmé Yann Pantel, l'un des représentants CGT, qui a confirmé la reconduction lundi de la grève, pour 24 heures supplémentaires.

"On ne va pas faire la saison tranquillement pour se faire manger à la rentrée", a-t-il expliqué, tout en montrant la détermination des personnels. Les marins ont déjà conduit 47 jours de grève dans le passé, "sans casse", a-t-il rappelé.

Pendant ce temps-là, sur le port de Marseille et en Corse, la situation continuait à se tendre.

Sur le continent, le Kalliste, bateau de la Méridionale, seule autre compagnie assurant la liaison Corse-Marseille, était toujours bloqué par des marins grévistes. La plupart des bateaux de croisière, qui assurent une manne financière à la ville, continuent à se dérouter vers d'autres ports méditerranéens.

En Corse, un nouveau rassemblement de plusieurs centaines de représentants du monde économique avait lieu lundi matin devant la préfecture de Bastia, après une évacuation musclée de la préfecture vendredi.

Les organisations socio-professionnelles de Corse (syndicats patronaux, CCI, transporteurs, agriculteurs) s'estiment pénalisées par le mouvement de grève. Elles dénoncent le blocage du Kalliste et estiment que, si le flux de passagers peut à peu près être absorbé par les compagnies concurrentes, il n'en est pas de même pour le fret.

Le passage des remorques par Toulon crée non seulement un surcoût en carburant, mais aussi en heures supplémentaires pour les chauffeurs, fait valoir également le patron du syndicat de Transporteurs Corse, Jean-Marie Maurizi.

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