Les syndicats européens "résisteront au diktat de l'austérité": le nouveau leader de la Confédération européenne des syndicats (CES), Luca Visentini, élu vendredi à Paris, compte faire entendre ce message aux dirigeants européens et peser sur leurs décisions.
Plus de 500 délégués représentant 90 organisations syndicales de 39 pays - dont les 28 de l'UE- étaient réunis depuis lundi à la Mutualité à Paris pour ce 13e congrès de la CES.
"Nous avons résisté aux attaques qui ont mis à mal les travailleurs et les syndicats" au cours des dernières années "qui ont été la pire période pour les syndicats", a lancé l'Italien de 46 ans, qui succède à la Française Bernadette Ségol.
"Notre mission est de continuer à résister", a-t-il dit à la clôture du congrès.
La CES entend prendre au mot les dirigeants européens. Lundi, le chef de l'Etat français François Hollande et le président de la Commission européenne Jean-Claude Juncker avaient multiplié les promesses de relance du dialogue social en Europe pour inclure les syndicats.
M. Juncker a promis l'instauration au printemps 2016 d'un "socle de droits sociaux minimum: à même travail, les mêmes salaires et les mêmes droits".
"La première chose que je ferai lundi prochain, c'est d'écrire à M. Juncker pour demander à le rencontrer et voir s'il a réellement l'intention de transformer ses déclarations en actes", a lancé M. Visentini.
- 'pas touche au droit de grève' -
Dans son "manifeste de Paris", feuille de route adoptée par les congressistes à l'unanimité moins cinq abstentions, la CES réclame notamment un programme d'investissement en Europe pour assurer des "emplois de qualité".
Elle demande aussi "la fin des politiques d'austérité" des "hausses de salaires", "le respect du dialogue social", des "négociations collectives partout en Europe", "des normes sociales ambitieuses" et en priorité "la fin du dumping social".
"Et pas question de toucher à notre droit de grève", a lancé le nouveau président de la CES, le Belge Rudy de Leeuw, qui a dénoncé des attaques contre les libertés syndicales et contre le droit de grève en Grande-Bretagne.
Mais les difficultés des syndicats européens, qui souvent ne parviennent à s'accorder que sur le plus petit dénominateur commun, sont liées aux "disparités des situations en matière de croissance et d'emploi" en Europe, ce qui constitue un "défi", a rappelé l'autrichien Erich Folgar.
S'ils veulent relancer la CES, les syndicats affiliés doivent aussi balayer devant leurs portes: "Il faut revivifier le débat au sein de la CES, fixer note propre agenda de projets" pour "influencer la gouvernance européenne", a lancé le numéro de la CFDT, Laurent Berger.
Il a prôné une "meilleure coordination" entre les syndicats et un "débat mois formel, plus ouvert".
Gail Cartmail du TUC britannique a réclamé aussi une CES "plus efficace, moins bureaucratique".
La question des réfugiés a été au coeur des débats du Congrès, alors que l'Europe connaît une des plus graves crises migratoires de son histoire.
Dans une résolution, le Congrès a demandé une "révision du droit d'asile" en Europe et condamné les pays de l'UE qui dressent des "clôtures et refusent le plan de répartition des réfugiés", en allusion à des pays de l'Est de l'Europe.
"L'adoption de cette résolution n'a pas été une mince affaire", souligne un syndicaliste qui rappelle les différences de politique et d'opinion entre les pays européens sur ce sujet.
"Le mal c'est le nationalisme, face à cela une riposte, la solidarité", a martelé Rudy de Leeuw.
M. Visentini, poète à ses heures, s'est entouré d'une équipe renouvelée. Issu du syndicat italien UIL, il est rompu aux arcanes bruxelloises puisqu'il était déjà membre de l'équipe de direction sortante de la CES.
Cinq syndicats français sont affiliés à la CES: CGT, CFDT, FO, CFTC, Unsa.