Cap sur l'Amérique ! Le groupe pharmaceutique Aguettant a engagé depuis trois ans une ambitieuse refonte de sa gamme, de ses procédures et de son outil industriel afin de pouvoir se présenter devant la sourcilleuse gardienne de la santé américaine, la FDA.
La société, spécialiste des produits injectables utilisés à l'hôpital, inaugure officiellement jeudi un nouvel ensemble immobilier rassemblant siège social, centre de recherche et développement et unité de production, en face de son bâtiment historique de Gerland, le quartier lyonnais des sciences de la vie.
Un gros investissement (40 millions d'euros) pour une entreprise dont le chiffre d'affaires s'établissait l'an dernier à 106 millions d'euros. D'autant qu'Aguettant a engagé dans le même temps la modernisation de sa seconde usine, située à Champagne (Ardèche).
- "Belle endormie" -
Fondée en 1903, mais revendiquant des racines remontant aux années 1830, la discrète maison lyonnaise était une "belle endormie", reconnait son président du directoire Eric Rougemond.
Aux manettes depuis février 2013, ce médecin devenu manager, riche d'une forte expérience internationale acquise dans plusieurs petits groupes pharmaceutiques, n'est que le deuxième patron extérieur à la famille Aguettant dans la longue histoire du groupe.
A son arrivée, il s'est vu assigner l'objectif à dix ans de doubler le chiffre d'affaires et de faire passer de 25% à plus de 50% la part des ventes réalisées à l'étranger.
"Aguettant était jusqu'ici une société franco-française, avec un portefeuille de produits +génériqués+ ou +génériquables+, ce qui induisait une forte pression sur les prix", analyse M. Rougemond dans un entretien avec l'AFP.
"Il était important de la faire évoluer", en apportant plus de valeur ajoutée à nos produits, poursuit-il. "On récrée de la valeur en répondant à des besoins qui n'étaient pas bien couverts", en réduisant par exemple le gaspillage ou en améliorant la facilité d'utilisation.
"Sur tous les grands marchés, les exigences réglementaires sont très fortes. Elles le sont plus encore pour les produits injectables car ceux-ci passent directement dans l'organisme", relève M. Rougemond.
Dans une gamme très vaste, Aguettant a choisi de privilégier les produits utilisés en anesthésie-réanimation, comme l'atropine ou l'adrénaline. Un deuxième axe de développement est la nutrition parentérale, mais la société lyonnaise, qui ne compte que 529 salariés, a choisi d'en confier la commercialisation au géant américain Baxter, pour ne pas surcharger ses équipes.
L'offre est progressivement resserrée autour des produits phares, auxquels pourraient s'ajouter à terme les injections contre la maladie de Parkinson.
"La modernisation de l'outil industriel doit nous permettre de s'adapter à cette évolution de la gamme de produits", relève M. Rougemond.
- Une rentabilité améliorée -
Une douzaine de procédures d'autorisation de mise sur le marché (AMM) ont été déposées et le groupe s'est lancé sur des marchés comme l'Allemagne, l'Espagne ou l'Italie où il était jusqu'alors absent.
Les retours commerciaux de cette stratégie alliant innovation et internationalisation sont "très bons" et la société a amélioré de manière "conséquente" sa rentabilité, assure son patron.
Maintenant, ce sont les Etats-Unis, le plus riche marché mondial en matière de santé, qu'Aguettant a dans son viseur.
"Nous sommes désormais en capacité de demander l'homologation de la FDA sur nos deux axes" de développement prioritaires, ajoute M. Richemond, qui estime son groupe désormais "au niveau" par rapport à la concurrence locale.
Non coté en Bourse - et n'ayant pour l'heure aucun projet en ce sens - le groupe reste contrôlé à 76% par la holding de la famille Aguettant. Son conseil de surveillance est présidé par Sébastien Aguettant, qui possède par ailleurs la société Delpharm, qui produit à façon des médicaments pour le compte des grands laboratoires pharmaceutiques.
Mais les deux entreprises n'ont "rien à voir", si ce n'est la personne même de M. Aguettant.