L'opposition au président de centre droit Mauricio Macri a lancé mercredi une grève de 24 heures en Argentine, paralysant l'activité économique pour protester contre l'incapacité du gouvernement à réduire l'inflation qui a atteint 55% sur un an.
Métros, autobus et trains de banlieue étaient à l'arrêt, tous les vols étaient annulés dans les aéroports du pays, banques, écoles et administrations fermées, et la plupart des commerces avaient également le rideau baissé, faute de transports en commun pour les employés.
"La grève est suivie car il n'y a eu aucune réponse, ni réaction du gouvernement aux revendications", a déclaré Hugo Moyano, un des leaders les plus influents du mouvement syndical argentin.
Le pouvoir d'achat des 44 millions d'Argentins est en chute libre du fait de la hausse des prix, la pauvreté augmente, l'économie est en récession, et le gouvernement mène une politique de rigueur budgétaire, sous la pression du FMI.
Les syndicats demandent des hausses salariales alignées sur l'inflation.
- Déçus par Macri -
"Il y a un grand mécontentement contre le gouvernement. De nombreux travailleurs ont voté pour ce gouvernement car il allait supprimer l'impôt sur le revenu, ils leur ont fait confiance mais cette fois, ils ne vont pas se tromper de nouveau", a souligné Hugo Moyano, en référence à l'élection présidentielle du 27 octobre.
Le patron du syndicat des routiers, un des plus puissants de ce pays grand comme 5 fois la France, soutient le ticket présidentiel de gauche formé par l'ex-présidente Cristina Kirchner et son ex-chef du gouvernement.
"Les gens sont otages du fonctionnement des transports en commun. Lors de la précédente grève générale, certains transports fonctionnaient et les gens sont allés travailler", a dénoncé le ministre argentin des Transports Guillermo Dietrich.
C'est la cinquième grève générale du mandat de Mauricio Macri, applaudi par les grandes puissances pour son réformisme mais très critiqué en Argentine. Arrivé au pouvoir fin 2015, il brigue un second mandat de quatre ans, et se trouve affaibli par la crise économique qui frappe le pays depuis 2018.
Pour stabiliser la troisième économie d'Amérique latine, il a sollicité un prêt du FMI, qui a débloqué en 2018 le versement de 56 milliards de dollars sur trois ans. En contrepartie, les coupes budgétaires exaspèrent la population.
Forts du succès de la grève de mercredi, les syndicats tirent à boulets rouges sur le président, en mauvaise posture dans les sondages à cinq mois du scrutin.
"Le mouvement ouvrier réitère son appel à des actions immédiates pour freiner la décadence politique, sociale et économique", a lancé Hector Daer, un dirigeant de la CGT, le plus puissant des syndicats d'Argentine.
- Pertes d'emplois -
Les rues de Buenos Aires, une agglomération de 13 millions d'habitants, étaient inhabituellement calmes mardi, sans taxis, ni autobus.
"Nous ne voulons plus d'ajustements. Ni de licenciements, il faut les interdire. On ne veut plus voir des gens qui ont faim. On veut que la situation change complètement", dit Gustavo Michel, un ouvrier d'une raffinerie, près de Buenos Aires.
"De nombreuses entreprises ferment, se désole-t-il. Des familles se retrouvent à la rue. C'est terrible car il n'y plus de travail".
D'après les syndicats, 290.000 emplois ont été perdus en trois ans.
Andrés Simoni, 20 ans, n'a pas fait grève. Depuis qu'il a perdu son travail dans une pharmacie, il vend des sandwiches dans la rue et ne peut pas se permettre une journée sans revenus.
Mais mercredi, il a du mal à les écouler. "Il n'y a personne, c'est un désert", se plaint-il, avant d'enfourcher son vélo pour aller dans un autre quartier, espérant y trouver des touristes.
Les syndicats n'ont pas appelé à des manifestations mais des groupes de gauche ont bloqué pendant quelques heures des routes d'accès à Buenos Aires.
"On souffre avec les augmentations des services publics (électricité, gaz, transport) à cause de Macri et du FMI. On ne va pas leur simplifier la tâche, à Macri et à son gouvernement", prévient Cristian Duran, un chômeur qui participe à un blocage.
"Ces grèves, ce ne sont pas des caprices de dirigeants syndicaux. J'espère que le message que lui donne la société fera réfléchir le président et le conduira à changer", a conclu Hugo Moyano.