Perte de 200.000 emplois, 40% d'inflation, économie en récession, le président argentin de centre droit Mauricio Macri achève une première année de mandat difficile, mais une reprise économique de 3% s'annonce pour 2017.
Pour justifier la mauvaise passe économique, le chef de l'Etat invoque "l'héritage catastrophique" des 12 années de présidence de Nestor (2003-2007) et Cristina Kirchner (2007-2015), qui ont mené une politique de gauche axée sur un protectionnisme économique et un alignement diplomatique sur le Brésil de Lula et Dilma Rousseff et le Venezuela d'Hugo Chavez.
Les réformes libérales que réclamaient les marchés ont été engagées, le contrôle des changes a été aboli, le litige sur la dette hérité de la crise économique de 2001 réglé, les restrictions sur les importations assouplies.
L'inflation endémique (plus de 20% par an depuis 2009) a été attisée par une suppression brutale des subventions de l'Etat aux factures d'électricité, de gaz et d'eau, d'un montant jusque-là dérisoire.
"Je ne m'en sors plus. Quand je vais au supermarché, je demande à payer en plusieurs fois. L'inflation dépasse les 40% et mon salaire n'a été augmenté que de 30%", se lamente Margarita Lopez, 46 ans, assistante commerciale dans une entreprise de maçonnerie et mère célibataire. Sa facture d'électricité est passée de 5 à 60 euros.
- Pauvreté en hausse -
L'Eglise s'alarme. Pendant les premiers mois du mandat de M. Macri, un million d'Argentins ont basculé dans la pauvreté. Les soupes populaires ne désemplissent pas, du jamais vu depuis la crise de 2001.
"Cela a été une année difficile en matière économique", admet le chef du gouvernement Marcos Pena.
Les réformes, douloureuses, étaient nécessaires, le pays allait droit dans le mur et il faut investir dans les infrastructures et limiter le déficit budgétaire, se justifie le ministre argentin des Finances Alfonso Prat-Gay. Le gouvernement appelle les 43 millions d'Argentins à la patience.
"Nous allons y arriver", assure M. Macri, 57 ans.
Pour 2017, le gouvernement s'est fixé pour objectif de sortir le pays de la récession avec une croissance de 3,5% du Produit intérieur brut (PIB). Il prévoit aussi une inflation à 17%.
Le Fonds monétaire international (FMI) prévoit de son côté une croissance de 2,7% en 2017, après un recul du PIB de 1,7% cette année.
Selon un sondage, 43% des Argentins désapprouvent et 26% approuvent l'action du président.
S'il devait se noter, il s'accorderait 8 sur 10, a dit M. Macri en guise de bilan de sa première année à la tête de la troisième économie d'Amérique latine. "J'avais prévenu, je ne suis pas (le magicien) David Copperfield".
Rare satisfaction dans un paysage morose, les exportations agricoles, stimulées par une baisse des prélèvements fiscaux, se sont envolées de 25% sur les neuf premiers mois de 2016, après une récolte record.
Si le gouvernement piétine en matière économique, il s'en sort sur le plan politique, bien aidé par une opposition en pleine déconfiture: les accusations de corruption pleuvent sur Mme Kirchner, un homme d'affaires proche d'elle est en prison, et un ancien ministre a été pincé en train de dissimuler 9 millions de dollars en liquide dans un couvent.
"Il y a un an, la question centrale était la gouvernabilité", rappelle le politologue Rosendo Fraga. Alors qu'on annonçait à M. Macri un pays ingouvernable, faute de majorité parlementaire, et une opposition virulente de Cristina Kirchner, le gouvernement est parvenu à légiférer en s'appuyant sur des alliés de circonstances.
- Obama, Hollande, Renzi -
Quelques semaines après son arrivée au pouvoir, avec l'appui du congrès, il a soldé le contentieux sur la dette avec les fonds "vautours", que l'Argentine traînait comme un boulet.
Sur le plan diplomatique, l'Argentine a renoué avec les grandes puissances. Le président américain Barack Obama, son homologue français François Hollande et les Premiers ministres japonais, canadien et italien se sont rendus à Buenos Aires pour saluer l'avènement de Mauricio Macri.
Ce fils d'un milliardaire italien ayant fait fortune en Argentine s'est fait connaître comme président du club de football de Boca Juniors, puis maire de Buenos Aires. Il a remporté l'élection présidentielle à la surprise générale, devant le candidat soutenu par la coalition de Cristina Kirchner.
Le prochain défi sera les élections législatives de mi-mandat en octobre 2017. M. Macri a convaincu les milieux d'affaires lors d'un mini-Davos en septembre à Buenos Aires. Désormais, les entreprises étrangères sont dans une phase attentiste, avant de déclencher les investissements sur lesquels mise le gouvernement.