Le financier américain Bernard Madoff a été condamné lundi à 150 ans de prison par un tribunal de New York.
"Bernard Madoff est condamné à 150 ans de prison. Ainsi en a décidé cette cour," a déclaré le juge Denny Chin.
Madoff avait auparavant présenté ses excuses aux victimes de son escroquerie, l'une des plus grandes de l'histoire, affirmant qu'il devra "vivre avec cette douleur" le reste de sa vie, devant .
Le ministère public américain avait requis 150 ans de prison à l'encontre de l'ex-président du conseil d'administration du Nasdaq.
A 71 ans, l'ancienne coqueluche des milieux financiers, qui a jonglé pendant trente ans avec les milliards de dollars confiés par des banques, des particuliers aisés ou des organisations caritatives, avait plaidé coupable le 12 mars des 11 chefs d'inculpation, dont fraude, parjure, blanchiment d'argent et vol.
Madoff est, depuis, incarcéré, bien loin du confort de son luxueux appartement de l'Upper East Side (nord-est de Manhattan).
Au total, selon les enquêteurs, 13 milliards de dollars lui ont été remis et, selon les estimations, les pertes se chiffreraient entre 50 et 65 milliards, correspondant aux gains qu'auraient engendré les sommes prêtées si les intérêts avaient été réels.
Le juge du tribunal du district sud de New York, chargé de son procès, a par ailleurs publié un mandat préalable autorisant la confiscation des biens de M. Madoff à hauteur de 170 milliards de dollars.
Le financier a avoué n'avoir jamais investi un centime des sommes qu'il avait en portefeuille. Il avait monté un "schéma de Ponzi" --nom d'un de ses prédécesseurs des années 20--, une cavalerie financière qui consistait à rémunérer les investisseurs avec l'argent déposé par de nouveaux clients.
Le système a fonctionné jusqu'au jour où les demandes de retrait ont explosé avec la crise de l'automne 2008. Il n'a plus été capable de faire face.
En plaidant coupable, il évite un procès devant un jury. Le public présent au tribunal entendra des victimes, puis la sentence prononcée par le juge Denny Chin, dans le procès pénal que lui intente le gouvernement.
"Je prédis qu'il sera condamné à 20 ans de prison ou plus, peut être 25 ans", dit à l'AFP Bradley Simon, un ancien procureur devenu avocat. "Cela revient quasiment à la prison à vie pour quelqu'un âgé de 71 ans".
Même en bénéficiant d'une peine de 20 ans et d'un régime de réduction de peine, Madoff ne sortirait pas avant ses "88 ans", renchérit un autre ancien procureur, William Devaney.
L'avocat de Madoff demande l'indulgence: une peine de 12 ans de prison, un peu moins des "13 ans qui lui restent à vivre", selon les statistiques américaines d'espérance de vie.
L'affaire avait éclaté le 11 décembre. En fin d'après-midi, un communiqué laconique des autorités annonçait l'arrestation d'un courtier célèbre, PDG de l'entreprise "Bernard Madoff Investment Securities" (BMIS).
Le millionnaire vénéré au sein de la haute société avait réuni ses deux fils la veille et leur avait déclaré qu'il "n'avait plus rien et avait perdu environ 50 milliards de dollars", selon le document du tribunal.
Assigné à résidence, l'ancien roi de Wall Street avait pu assister au désarroi de ses clients, de la banque Santander en Espagne à la Fondation Elie Wiesel aux Etats-Unis, des vedettes de Hollywood aux retraités qui lui avaient confié leurs économies.
Après le volet pénal, d'autres instances, civiles, l'attendent. Et l'audience ne permettra pas de connaître les montants à restituer: la justice se dit incapable de les chiffrer, et les procureurs ont demandé un délai de trois mois, au terme duquel "la Cour ordonnera la restitution (de l'argent) ou décidera que la restitution est impossible".