CHISINAU (Reuters) - Le président de la banque centrale de Moldavie a annoncé lundi sa démission face à la colère populaire mais a rejeté toute responsabilité dans la disparition du système bancaire de l'équivalent d'un milliard de dollars, soit environ un huitième du produit intérieur brut de cette ex-république soviétique.
Dorin Dragutanu et son adjoint Marin Molosag ont remis leur démission au Parlement. Ils resteront néanmoins à la tête de l'institution à titre intérimaire et recevront une délégation du Fonds monétaire international (FMI) attendue mardi.
Dorin Dragutanu, qui devient ainsi la première personnalité emportée par le scandale, s'est présenté comme le bouc émissaire pour les malversations de la classe politique.
"Les dirigeants politiques exercent des pressions directes de tous côtés sur la Banque nationale en s'efforçant d'établir un lien entre l'institution et le vol d'argent dans les banques (...) J'ai le sentiment que la Banque nationale est devenue la cible d'attaques déterminées de la part des dirigeants politiques", a dit le président de la banque centrale moldave.
Des dizaines de milliers de manifestants s'étaient rassemblés le 6 septembre à Chisinau, la capitale, pour dénoncer ce scandale bancaire et exiger la démission de responsables politiques. Certains ont installé un campement d'environ 300 tentes dans le centre de la capitale en promettant d'y rester tant qu'ils n'auraient pas obtenu gain de cause.
L'annonce en avril de la disparition de l'équivalent d'un milliard de dollars a provoqué une forte dépréciation du leu, la monnaie nationale, qui a perdu près de 60% de sa valeur face au dollar par rapport à l'an dernier, ce qui alimente l'inflation dans un pays au niveau de vie déjà très faible.
Ce scandale fragilise en outre les dirigeants pro-européens au pouvoir depuis 2009. Il a amené l'Union européenne et la Banque mondiale à suspendre le versement de leur aide financière et le FMI à retarder une visite consacrée à un éventuel nouveau programme d'assistance.
Trois banques ont été conduites à la banqueroute par la fraude, qui, selon Dorin Dragutanu, a débuté avant 2009 mais n'a été révélée que cette année avec la publication d'un rapport du cabinet de conseil Kroll. Dans un communiqué, le Premier ministre, Valeriu Strelet, a jugé que Dorin Dragutanu portait "l'entière responsabilité" de la situation du secteur bancaire.
(Alexander Tanas, Bertrand Boucey pour le service français, édité par Marc Angrand)