par Elizabeth Piper, Kylie MacLellan et William James
LONDRES (Reuters) - Les députés britanniques ont voté massivement jeudi en faveur d'un report du Brexit, actuellement fixé au 29 mars, ce qui va permettre à Theresa May de tenter une troisième fois de faire ratifier par les parlementaires son accord de retrait de l'Union européenne, pourtant déjà rejeté à deux reprises.
Les élus ont approuvé par 412 voix contre 202 une motion gouvernementale prévoyant un report de courte durée, au plus tard au 30 juin, en cas d'adoption d'un traité de divorce d'ici mercredi, ou un report de longue durée - sans aucune limitation - en cas de rejet.
L'un ou l'autre de ces reports devra être unanimement approuvé par les 27 autres dirigeants des pays membres de l'Union européenne, qui se réuniront jeudi et vendredi prochains en sommet à Bruxelles, a rappelé la Commission européenne à l'issue du vote des Communes. Les raisons et la durée de ce report seront étroitement examinées avec pour priorité d'assurer le bon fonctionnement des institutions communautaires, a déclaré un porte-parole de l'exécutif européen.
Theresa May espère que la menace d'un report de longue durée finira par convaincre les partisans du Brexit au sein de son Parti conservateur, ainsi que les membres du petit parti unioniste nord-irlandais DUP qui assurent la survie de son gouvernement minoritaire, de voter enfin en faveur de l'accord de retrait qu'elle a conclu en novembre dernier avec l'UE.
Les Brexiters et les unionistes nord-irlandais jugent le texte inacceptable en l'état, car il prévoit le maintien du Royaume-Uni dans une union douanière avec l'UE - dans l'attente du résultat des négociations sur les relations futures entre les deux entités - afin d'empêcher le rétablissement d'une frontière entre les deux Irlande.
Le porte-parole de la Première ministre a déclaré que les ministres du gouvernement étaient déterminés à "redoubler d'efforts" pour obtenir une sortie de l'UE avec un accord.
Dans la matinée, le président du Conseil européen Donald Tusk avait pour sa part promis d'"inviter les Vingt-Sept à accepter un long report si le Royaume-Uni le juge nécessaire pour repenser sa stratégie et bâtir un nouveau consensus".
LES PRÉPARATIFS EN VUE D'UN NO-DEAL SE POURSUIVENT
Le vote de la motion gouvernementale a été précédé d'une série de votes sur trois amendements présentés par les élus, qui ont tous été rejetés.
Les députés ont ainsi écarté par 334 voix contre 85 un second référendum sur l'appartenance à l'UE, après celui de juin 2016 par lequel près de 52% des Britanniques ont voté pour quitter le bloc communautaire.
Peu d'élus d'opposition, y compris parmi les partisans d'une nouvelle consultation, soutenaient cet amendement déposé par un groupe d'indépendants, jugeant que le moment n'était pas opportun pour que le Parlement se prononce sur cette question.
En revanche, un amendement qui aurait redonné au Parlement la main pour organiser des débats et des votes "indicatifs" sur des options alternatives susceptibles de réunir une majorité - qui aurait sérieusement limité la marge de manoeuvre de Theresa May - a été rejeté de justesse par 314 voix contre 312.
Le vote des Communes ce jeudi ne signifie pas qu'un report aura bien lieu, l'accord unanime des Vingt-Sept restant nécessaire.
Par défaut, la date du Brexit reste fixée au 29 mars et le porte-parole de May a indiqué que le gouvernement poursuivait ses préparatifs pour une sortie sans accord (no deal).
L'autorité de la Première ministre a volé en éclats lors du rejet, en janvier puis mardi dernier, de son accord de retrait par une très large majorité.
Mais elle continue d'affirmer qu'une sortie avec accord reste sa priorité, que le texte qu'elle a négocié avec Bruxelles est le meilleur possible, et ne désespère pas d'obtenir gain de cause lors d'un troisième "meaningful vote" (vote significatif) la semaine prochaine.
(Jean-Stéphane Brosse pour le service français)