L'équipementier Alcatel-Lucent, qui a subi une lourde perte au deuxième trimestre et a abandonné son objectif de rentabilité pour 2012, a annoncé jeudi la suppression de 5.000 postes dans le monde pour remonter la pente et retrouver la confiance des marchés.
Même si l'équipementier qui emploie 76.000 personnes ne dévoile pas quels sites seront touché, l'annonce vient allonger la liste des potentielles coupes sociales en France, après les dossiers PSA, Air France ou encore Sanofi.
Les difficultés d'Alcatel-Lucent se voyaient venir. Il avait annoncé dès le 17 juillet qu'il subissait une perte au deuxième trimestre et qu'il abandonnait son objectif de rentabilité pour l'année. Il est entré dans le détail jeudi, publiant une perte de 254 millions d'euros au deuxième trimestre, contre un bénéfice de 43 millions d'euros l'an passé.
Le chiffre d'affaires a lui chuté de 7,1% par rapport au même trimestre de l'année précédente à 3,545 milliards d'euros, bien qu'il soit en hausse de 10,6% par rapport au trimestre précédent, souligne le groupe.
"Au regard du contexte macro-économique qui se détériore et de la concurrence qui règne sur les prix dans de nombreuses régions du monde, et qui pèse sur notre rentabilité, nous devons amorcer une transformation plus ambitieuse" que celle déjà opérée, a déclaré le Directeur général Ben Verwaayen, cité dans le communiqué.
Le groupe a donc décidé de réaliser 750 millions d'euros supplémentaires d'économies, d'ici fin 2013, avec le Programme Performance, "pour accélérer cette transformation et réduire nos coûts de 1,25 milliard d'euros d'ici la fin de l'année prochaine", selon le DG.
La direction n'a pas souhaité donner plus de détails sur l'impact social pour le groupe de droit français, mais a souligné que ces suppressions d'emplois n'affecteraient pas les capacités de recherche et développement d'Alcatel Lucent.
"Dans un tel contexte, l'heure est à la fermeté", a déclaré M. Verwaayen avant d'ajouter qu'il fallait agir "de manière mesurée".
Les investisseurs ont toutefois sanctionné la perte enregistrée au second trimestre, à la Bourse de Paris, le titre Alcatel-Lucent chutant de 8,57% vers 11H50 (09H50 GMT) jeudi, atteignant ainsi son plus bas historique à 80 centimes, dans un marché en légère baisse de 0,27%.
"Les opérateurs s'attendaient à une mauvaise nouvelle, mais la perte est encore plus forte que prévu. Alcatel est affecté par le ralentissement des investissements de l'ensemble des opérateurs téléphoniques", a commenté Yves Marçais chez Global Equities.
"Nous ne croyons plus tellement à ces plans qui se sont succédés ces dernières années. On ne voit pas comment l'entreprise peut s'en sortir alors que le ralentissement économique mondial s'accentue", relève l'analyste.
Pour leur part, les syndicats français d'Alcatel-Lucent ont indiqué à l'AFP avoir découvert jeudi ces suppressions de poste et n'avoir "aucune visibilité" à ce stade. Ils s'attendent à ne pas avoir plus d'éléments avant un Comité central d'entreprise (CCE) qui pourrait, selon eux, avoir lieu fin août, début septembre.
Pour Stéphane Dubled (CGT), l'impact de ces annonces est difficile à prévoir en France, où le groupe emploie quelque 9.000 salariés, parce que la direction n'a pas "donné de répartition mondiale".
Mais, dit-il, "si on se fie aux fois précédentes, ils sont généreux en termes de suppressions d'emplois sur l'Europe".
Selon Hervé Lassalle (CFDT), "on est sûrs que la zone Europe va être touchée", dit-il. "C'est là que commercialement, on est moins bien".
Depuis la fusion avec Lucent en 2006, quelque 20.000 postes ont été supprimés, estime le syndicaliste. Il y a eu notamment 12.500 suppressions dans le monde en 2007, 4.000 en 2008, 1.000 en 2009 et de nouvelles suppressions en 2009-2010, a rappelé M. Lassalle, relevant que les effectifs totaux avaient peu diminué malgré cela, en raison de rachats d'activités.