Le déficit de la Grèce a été plus élevé que prévu l'an dernier, selon des chiffres publiés mardi, entretenant les spéculations sur une restructuration de la dette du pays et faisant flamber les taux d'intérêt grecs sur les marchés.
Le déficit public de la Grèce a atteint 10,5% du produit intérieur brut en 2010, selon des chiffres publiés par l'institut statistique européen Eurostat.
C'est nettement plus que les 9,4% estimés jusqu'ici par le gouvernement grec, après 15,4% en 2009.
La dette est aussi gonflée, à 142,8% du PIB contre 142,5% prévu, avoisinant les 330 milliards d'euros.
La Grèce se retrouve ainsi largement en tête des pays les plus endettés de l'UE, loin devant l'Italie (119%) et la Belgique (96,8%).
Cette révision, attendue, découle selon le ministère grec des Finances "surtout de la récession plus grave que prévu de l'économie grecque, qui a affecté les rentrées fiscales et les cotisations sociales". Le PIB grec a reculé de 4,5% en 2010, contre une baisse de 4,2% prévu.
Le gouvernement grec avait anticipé cette révision à la hausse du déficit, en annonçant mi-avril des économies supplémentaires de 3 milliards d'euros pour 2011 en plus de celles déjà prévues par le budget.
Mais un an après avoir demandé l'aide de l'Union européenne et du Fonds monétaire international, et obtenu un plan de sauvetage de 110 milliards d'euros, la Grèce ne rassure pas vraiment. Elle continue d'être dans une situation économique critique, combinant récession et gonflement de la dette, que ces nouveaux chiffres ne viennent pas arranger.
Le chef de la représentation de la Commission européenne en Grèce, Panos Karvounis, a indiqué samedi que l'UE n'excluait pas de nouvelles mesures de réduction du déficit en Grèce après l'examen en mai de la viabilité de la dette publique du pays.
Le déficit révisé vient par ailleurs alimenter les doutes sur la solvabilité du pays, alors que les spéculations sont récurrentes sur l'hypothèse d'une restructuration de la dette grecque, c'est-à-dire que le pays ne puisse plus rembourser tout ce qu'il doit.
Après l'annonce d'Eurostat, les taux d'intérêt grecs flambaient mardi après-midi sur les marchés obligataires.
Les taux à 2 ans et à 10 ans que doit payer la Grèce pour emprunter s'envolaient à des niveaux inédits: le rendement de l'obligation d'Etat à 2 ans progressait à 23,34% contre 22,207% en clôture vendredi soir et le taux sur le 10 ans à 15,015% contre 14,718%.
Beaucoup sur les marchés se demandent si la Grèce n'a pas accumulé une charge de la dette insoutenable, qui l'obligera à restructurer ses obligations, en rééchelonnant les remboursements ou en réduisant les montants à rembourser.
Des déclarations du ministre allemand des Finances Wolfgang Schaüble avaient déjà relancé récemment les craintes d'une restructuration de la dette.
La BCE y est cependant fortement opposée.
Le gouverneur de la banque centrale de Finlande, Erkki Liikanen, également l'un des dirigeants de la BCE, a déclaré mardi qu'une restructuration de la dette grecque "ne servirait à rien" pour remettre en état les finances du pays.
José Manuel Gonzalez-Paramo, membre du directoire de la BCE, a prévenu de son côté qu'elle aurait des effets encore plus graves que la faillite de la banque américaine Lehman Brothers, qui avait précipité la crise financière en 2008.
Dans un entretien ce week-end avec la chaîne publique allemande ZDF, le chef économiste de la BCE Jürgen Stark avait aussi averti qu'une restructuration de la dette d'un pays membre de la zone euro risquait de provoquer "une nouvelle crise bancaire", car "au sein de la zone euro, les marchés de capitaux sont fortement imbriqués".