Dans un monde économique encore morose, sacs à main, montres, champagne et cognac ont permis au luxe d'afficher une belle prospérité en 2010, grâce encore à la Chine, sa terre de croissance, et l'horizon s'annonce dégagé en 2011, sauf perturbations internationales.
Le numéro un mondial du secteur, le français LVMH (mode, maroquinerie, vins et spiritueux, etc.) ne publiera que vendredi ses résultats annuels, mais déjà les analystes prédisent des ventes dépassant pour la première fois les 20 milliards d'euros, 18% de plus qu'en 2009.
La veille, la maison Hermès devrait annoncer des ventes approchant les deux milliards d'euros (+24%).
Le joaillier américain Tiffany s'estime sur "de bons rails" pour établir un record annuel de ventes, ce qu'a déjà fait le suisse Swatch, leader mondial de l'horlogerie, avec des ventes en hausse de 18,8%.
Si le cognac a battu un record absolu de vente, le champagne, particulièrement affecté par la crise en 2009 (-9%), a quasiment rattrapé son retard.
En 2011, les performances s'annoncent bonnes mais moindres, corrigées des forts effets de balancier observés en 2009 et 2010, selon les analystes interrogés par l'AFP.
La crise a en effet effrayé les revendeurs de montres ou de champagne et dans une moindre mesure de parfums qui ont déstocké massivement. Avec la reprise, un an plus tard, ils ont au contraire reconstitué leurs stocks.
"En 2010, on a épongé les pertes de 2009", résume Joëlle de Montgolfier, directrice du pôle européen luxe et distribution du cabinet Bain & Cie, selon laquelle cependant "ce sont surtout les grandes marques qui ont tiré leur épingle du jeu pendant la crise, profitant d'un repli sur les valeurs sûres".
Cette année, le secteur devrait afficher une croissance des ventes comprise entre 3 et 5% contre 10% l'an dernier, selon Bain.
Les analystes de HSBC, dont le champ d'étude est limité aux plus grands acteurs du luxe, tablent sur 11% contre 13% en 2010 et 9% en 2012.
Les marchés traditionnels comme l'Europe et les Etats-Unis ont repris de la vigueur l'an dernier alors que le Japon, toujours en retrait, pourrait revenir dans la course.
Le luxe pourra surtout compter encore sur la Chine, qui selon HSBC est devenue le premier client des grands groupes.
"Les maisons touchent aujourd'hui les dividendes de leur politique d'économies pendant la crise mais aussi d'investissements ciblés", analyse Serge Carreira, maître de conférences à l'Institut d'études politiques de Paris.
Autrement dit, leur politique d'ouverture de boutiques en Chine est "un vrai moteur de croissance" avec "le tourisme chinois", de plus en plus important en terme d'achats dans le monde, poursuit-il.
Selon HSBC par exemple, les ventes de luxe en Europe de l'Ouest reposent pour 40 à 50% sur les touristes. Et les Chinois ne sont pas les derniers.
Signe également que l'Asie est devenue incontournable pour le luxe, l'italien Prada a choisi Hong Kong pour aller en Bourse. Un choix dicté aussi par une envie de gagner en notoriété.
Car la demande chinoise est en effet pour l'instant "très ciblée sur un nombre de produits mais aussi de marques comme Louis Vuitton, Dior, Chanel ou Cartier", souligne Serge Carreira.
2011, selon Mme de Montgolfier, pourrait par ailleurs voir la catégorie "accessoires" (sacs, chaussures, soieries, etc.) qui représentait en 2009 24% du marché du luxe prendre le pas sur celle de la mode et du prêt-à-porter (27%).
Cette bonne santé des accessoires se retrouve dans les ateliers français de maroquinerie qui tournent à plein régime et embauchent régulièrement.
Même les petites maisons bénéficient de ce succès: la maison Favre (gants) et Repetto (chaussures adaptées de la danse) embauchent aussi pour faire face à des commandes en hausse en 25% l'an dernier.