Quelque 50.000 d'Irlandais manifestaient dans le centre de Dublin samedi à la mi-journée contre le plan de rigueur draconien du gouvernement présenté comme la condition sine qua non d'un vaste plan d'aide qui devrait faire l'objet d'une réunion des 27 à Bruxelles dimanche.
Le cortège de 50.000 manifestants, selon une estimation de la police vers 13H00 GMT, est parti au son des cornemuses des quais de la Liffey pour rejoindre le GPO (General Post Office), lieu symbolique où avait été lue en 1916 la déclaration d'indépendance, dans le centre-ville.
Malgré un froid vif et des chutes intermittentes de neige sur Dublin, les Irlandais se sont mobilisés pour dénoncer le plan du gouvernement en difficulté du Premier ministre Brian Cowen, qui devrait soumettre le pays à un régime d'austérité sévère afin d'assurer le sauvetage de son secteur bancaire.
"Les coupes budgétaires ne sont pas nécessaires. On sauve les banques, pas l'Irlande. Ce sont les banques qui devraient souffrir, qu'on les laisse tomber", a plaidé Marian Hamilton, une Irlandaise de 57 ans qui craint de voir son allocation de handicapée baisser.
Elle est venue manifester avec son petit-fils de sept ans, alors que son fils a dû s'exiler en Australie pour trouver du travail.
Pour Mark Finley, un employé de la municipalité de Dublin de 28 ans, "il faut virer le gouvernement et faire la grève". "On doit envoyer un message clair à ce gouvernement. Mes revenus ont baissé de plusieurs milliers d'euros en deux ans, je n'y arrive plus", dénonce-t-il.
Les manifestants défilaient en chantant "Nous sommes le peuple, nous détenons les votes". Des bannières proclamaient : "Il y a une voie plus juste et meilleure" ou "l'Eire n'est pas à vendre, pas au FMI".
Ce plan est "une déclaration de guerre contre les travailleurs les moins bien payés", a estimé Jack O'Connor, président du Siptu, premier syndicat irlandais.
Les mesures d'austérité annoncées mercredi prévoient 15 milliards d'euros de réductions budgétaires et de hausses d'impôts d'ici à 2014, avec de réels sacrifices pour la population. Les allocations chômage et familiales seront réduites, tout comme les retraites des fonctionnaires et le salaire minimum, et près de 25.000 emplois publics seront supprimés.
Ce plan vise à ramener à 3% le déficit public irlandais, actuellement de 32% du produit intérieur brut.
L'annonce d'un accord d'aide internationale à l'Irlande, qui devrait atteindre 85 milliards d'euros, est en principe attendue avant l'ouverture des marchés, lundi matin.
Selon une source proche du dossier à Paris, les ministres des Finances de la zone euro puis des Vingt-Sept se réuniront dimanche à Bruxelles pour débattre de cette aide.
Selon les médias nationaux, Dublin pourrait devoir rembourser ce prêt à un taux de 6,7%, largement plus que les 5,2% demandés à la Grèce, ce qui ne va pas manquer d'ajouter à la colère de la population. "Un taux d'intérêt punitif", selon l'Irish Independent.
Quelque 700 policiers et un hélicoptère ont été mobilisés pour la marche. Plusieurs attaques ont ciblé ces derniers jours des ministres : l'un a été aspergé de peinture rouge, un autre saisi par la cravate par un électeur mécontent et un large "traîtres" a été peint sur la permanence d'un troisième.
Le mécontentement s'est également traduit dans les urnes, avec une cuisante défaite du parti au pouvoir, le Fianna Fail, jeudi, lors d'une législative partielle.
Cette défaite augure mal des élections anticipées que le gouvernement a été contraint d'annoncer pour début 2011, afin d'éviter une implosion de la coalition au pouvoir.