Bertrand Rochette, un des cadres mis en cause par Renault dans le cadre d'une affaire présumée d'espionnage, s'est dit lundi "trahi" par le constructeur qui l'a "jeté comme un malpropre" sans lui avancer la moindre preuve de son éventuelle implication.
"Je me sens trahi, je suis traîné dans la boue", a déploré M. Rochette au cours d'une conférence de presse dans le cabinet de ses avocats. "Je suis dans l'ignorance de ce qui pourrait fonder mon licenciement pour faute lourde après 22 ans chez Renault", a-t-il ajouté, regrettant d'avoir été "jeté comme un malpropre".
"Cela fait maintenant trois semaines que je suis accusé à tort d'espionnage industriel", a poursuivi M. Rochette, "déterminé à ne pas être le bouc émissaire de cette affaire" et à être réintégré dans l'entreprise.
Renault a déclenché en août 2010 une enquête interne après l'envoi d'une lettre anonyme.
L'affaire a conduit à la mise à pied de trois cadres du constructeur soupçonnés d'avoir diffusé des informations sensibles, et au dépôt le 13 janvier d'une plainte contre X "pour des faits constitutifs d'espionnage industriel, de corruption, d'abus de confiance, de vol et recel, commis en bande organisée".
M. Rochette, qui assure n'avoir jamais possédé de compte à l'étranger ni été en Chine, a de son côté déposé une citation contre Renault pour diffamation non publique.
"Nous sommes dans une situation qui n'a rien à voir avec un Etat de droit", a de son côté dénoncé un des avocats, Me Christian Charrière-Bournazel, qui a demandé au procureur de Paris Jean-Claude Marin, la communication de la plainte de Renault.
"Malheureusement, M. Marin n'a pas jugé nécessaire de nous répondre", a regretté l'avocat, s'interrogeant sur "les instructions" éventuelles données au procureur, qui n'est "pas un magistrat indépendant".
"Je ne peux admettre que celui qui mène l'enquête ne me dise pas ce qu'on reproche à mon client", a ajouté le conseil de M. Rochette. Selon lui, le président de Renault Carlos Ghosn "s'est répandu dans la presse sans rien dire de précis".
Bertrand Rochette a assuré qu'il était "prêt à fournir toutes les réponses" aux enquêteurs de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI). "Mais je n'ai pas encore été convoqué", a-t-il ajouté.
Informé des soupçons qui pesaient sur lui "le 3 janvier à 08H00", l'ancien directeur des avant-projets véhicules assure que ses fonctions ne le disposaient pas à être en contact avec l'extérieur ou des sous-traitants.
"Je suis pris dans une machine, un système qui me dépasse dans lequel il y a des intérêts très importants", a poursuivi M. Rochette, qui percevait 120.000 euros net annuels et a été licencié le 14 janvier.
M. Rochette a rapporté être allé en Suisse le 4 janvier avec des responsables de la sécurité de Renault sans finalement qu'il puisse "approcher de la banque" où il aurait disposé d'un compte. "Cette manoeuvre était destinée à me faire parler, trébucher", a conclu M. Rochette.