La Chine a vu son économie bondir de près de 12% sur un an entre janvier et mars, un niveau inégalé depuis 2007 qui, pour certains analystes, pourrait être la prémisse d'une surchauffe et apporter de nouvelles pressions sur les taux d'intérêt et la monnaie chinoise.
Après avoir renoué avec une croissance à deux chiffres au dernier trimestre 2009 (+10,7% sur un an), la Chine a enregistré une hausse de 11,9% en glissement annuel de son produit intérieur brut (PIB) début 2010, a annoncé jeudi le Bureau national des statistiques BNS.
"Il y a des signes de surchauffe", a estimé Stephen Green de Standard Chartered dans une note.
"La clef sera l'aptitude des autorités à orienter l'économie sur une voie plus durable, ou si une inflation généralisée et/ou des bulles d'actifs éclatent au second semestre et déclenchent un ralentissement en 2011", a-t-il ajouté dans une note.
"Ca va un peu trop vite. Des mesures de contrôle sont nécessaires pour empêcher une surchauffe", a dit à l'AFP Ben Simpfendorfer, économiste de Royal Bank of Scotland.
Mais la forte hausse du PIB est aussi due au fait qu'elle est calculée par rapport à un premier trimestre 2009 durant lequel l'économie chinoise n'avait progressé que de 6,2%, rythme enviable pour les économies occidentales mais faible pour le géant asiatique.
Aussi Mark Williams, analyste de Capital Economics, tempère-t-il les risques d'emballement de l'économie.
"A première vue, les chiffres pourraient suggérer la surchauffe. Mais l'accélération en glissement annuel est entièrement due à la faiblesse d'il y a un an. Comparé d'un trimestre sur l'autre, la croissance a continué de décélérer", explique-t-il.
"La pression sur les prix aussi semble s'alléger. Si nous nous attendons à des mesures au cours du prochain trimestre, elles n'ont pas besoin d'être extrêmes", ajoute-t-il.
L'inflation, négative l'an dernier, est de nouveau en hausse mais à 2,2% entre janvier et mars, reste sous la barre officielle des 3% fixée pour l'année, selon le BNS.
En mars, la hausse de l'indice des prix à la consommation, de 2,4% sur un an, s'est même "légèrement modérée par rapport aux 2,7% de février"', relève Jing Ulrich de JP Morgan, qui prévoit un indice en hausse de 3,2% en 2010.
"Nous avons toujours beaucoup de mal pour atteindre le but" d'une inflation inférieure à 3%, "mais je pense qu'il est à notre portée", a pour sa part affirmé le porte-parole du BNS Li Xiaochao, à la presse.
Moody's Economy.com relève aussi que les investissements en capital fixe, le crédit bancaire ou la masse monétaire ont décéléré pour le seul mois de mars.
"Cela montre que les mesures de contrôle du gouvernement commencent à agir", a commenté Alaistair Chan.
"Ceci est un signe positif et suggère une réduction des risques de surchauffe", ajoute-t-il.
Li Xiaochao s'est pour sa part félicité de la tendance générale: "Le rythme de la reprise s'est accéléré, ce qui pose de bonnes bases pour atteindre les buts fixés pour l'année", a-t-il dit.
Comme les années précédentes, le gouvernement chinois a fixé comme objectif une croissance de 8% en glissement annuel en 2010.
Ce but avait été dépassé l'an dernier (+8,7%) alors que selon les autorités, l'année 2009 avait été "la plus difficile du nouveau siècle".
Pour 2010 "tant que nous travaillons dur, je suis sûr que le but de 8% est à notre portée", a souligné Li Xiaochao.
La hausse des investissements en capital fixe a atteint +25,6% en glissement annuel (+26,4% dans les seules zones urbaines) au premier trimestre tandis que la production industrielle a augmenté de 19,6% en glissement annuel, après +18% au dernier trimestre 2009.