La crise des dettes publiques devrait faire basculer le secteur du bâtiment français dans le rouge en 2012, avec une perte de 35.000 emplois, alors qu'il commençait tout juste à se remettre cette année de la crise de 2008.
"La crise des dettes publiques en zone euro et les politiques de réajustement budgétaire ont fracassé le mouvement de reprise économique qui a porté, et porte encore pour quelques mois, l'embellie quantitative de nos marchés", a déclaré le président de la FFB, Didier Ridoret, lors d'une conférence de presse.
Le secteur du bâtiment, qui emploie actuellement 1,17 million de salariés et 80.000 intérimaires, devrait perdre 35.000 emplois en 2012, dont les deux tiers d'intérimaires.
Il s'agit d'un retournement notable de tendance pour ce secteur qui va parvenir en 2011 à créer 9.000 emplois, dont 8.000 intérimaires.
"Une digue va lâcher" en 2012 avec un scénario "proche de celui des années 1990, qui va durablement affecter l'appareil de production", a prévenu M. Ridoret.
Les années précédentes (2008, 2009, 2010), le secteur avait certes perdu des emplois, mais dans une proportion bien moindre puisqu'il s'agissait d'une perte de 40.000 emplois en trois ans.
Le secteur devrait entrer en "récession" en 2012, avec une baisse de l'activité en volume de 1,9%, après avoir progressé de 1,2% en 2011, et chuté de 3,8% en 2010.
L'activité devrait toutefois rester "soutenue" au premier semestre 2012, eu égard au niveau élevé des permis de construire et des mises en chantier enregistrés lors du second semestre 2011, mais elle sera "en crise" dès l'été, sous l'effet conjugué des plans de rigueur pour réduire les déficits publics et la contraction, jugée "très probable", du crédit.
Le chiffre d'affaires devrait aussi se contracter. De 123 milliards d'euros en 2010, il devrait augmenter à 124,4 milliards en 2011, puis retomber à 122 milliards en 2012.
"La coupe est pleine"
Tous les domaines seront touchés: la fédération prévoit un recul de l'activité de 2,8% dans le logement neuf, de 1% dans le logement non résidentiel neuf, et de 1,7% dans l'amélioration entretien.
En matière de crédit, la fédération ne constate pas de "blocage" actuellement, mais voit des "difficultés" dans les collectivités territoriales. M. Ridoret a exprimé à cet égard des "doutes sur la capacité" de la structure composée de la Caisse des dépôts et de la Banque postale à financer ces collectivités.
La FFB craint aussi une chute des prix, alors que les coûts augmentent. "Nous sommes en particulier inquiets sur l'évolution des tarifs de nos fournisseurs", qui annoncent des hausses en janvier "que nous serons, comme par le passé, incapables de répercuter dans nos prix", a souligné M. Ridoret.
Pour lui, la hausse de la TVA de 5,5% à 7% "n'est pas la mesure la plus douloureuse" pour le bâtiment, contrairement à la suppression du prêt à taux zéro (PTZ+) dans l'ancien et du dispositif "Scellier", un avantage fiscal pour les investisseurs achetant des logements neufs pour les louer.
Très pessimiste en matière de croissance, M. Ridoret "ne voit pas comment on échappera à un troisième plan de rigueur".
Pour la fédération, le Produit intérieur brut, auquel le bâtiment contribue à hauteur de 5 à 7%, ne devrait croître que de 0,5% en 2012, alors que le gouvernement table sur 1% et l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) sur 0,3%. Le chômage atteindra lui près de 10%.
"La coupe est pleine. Les entreprises du bâtiment ne veulent plus contribuer encore" à la réduction des déficits publics, a estimé le dirigeant de la FFB, qui a de nouveau appelé au lancement d'un Grenelle de l'immobilier pour "remettre le secteur sur le chemin de la croissance".