Le Forum mondial sur la transparence fiscale a établi un classement dans lequel la Suisse est épinglée aux côtés de paradis fiscaux bien connus, selon des documents obtenus jeudi par l'AFP qui doivent être présentés officiellement à Jakarta.
La Suisse est l'un des rares pays à ne pas valider la "phase 1" du classement, qui porte sur l'existence d'un cadre légal propice à l'échange d'informations entre les administrations et donc à la traque aux fraudeurs, souligne le "Forum mondial sur la transparence et l'échange de renseignements à des fins fiscales", organisation de 120 pays qui tient à Jakarta sa sixième réunion mondiale sous l'égide de l'Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
La "phase 2" porte sur l'application concrète.
Le classement du Forum, qui doit être officiellement présenté vendredi à Jakarta, estime que le passage de la Suisse à cette deuxième étape est "soumis à conditions".Ce terme diplomatique permet à la Suisse de se distinguer d'autres pays dont la réputation de paradis fiscaux n'est plus à faire.
En effet, pour les autres Etats qui ne passent pas à la "phase 2", c'est-à-dire dont le cadre législatif et réglementaire n'est pas validé, le verdict est tout simplement "Non". Il s'agit de 13 pays, entre autres du Bruneï, du Botswana, du Panama, des îles Marshall, de Trinidad et Tobago, du Liban ou encore du Vanuatu.
A Berne, on relativisait ce classement, en indiquant que la Suisse ne s'attendait pas à dépasser la phase 1 mais qu'elle avait lancé les réformes nécessaires.
Le porte-parole du Secrétariat d’Etat aux questions financières internationales de Suisse a assuré que "ces efforts ont reçu un écho positif".
"Nous espérons que la Suisse va bouger très rapidement", a déclaré le responsable des questions fiscales de l'OCDE, Pascal Saint-Amans, qui entend "s'assurer que ces démarches vont aboutir à des lois, ce qui n'est pas encore le cas aujourd'hui."
En ce qui concerne les 50 pays déjà soumis à l'examen plus concret de la phase 2, 18, dont la France, sont jugés "conformes" sans réserves aux principes de transparence fiscale édictés par le Forum.
Beaucoup, dont l'Allemagne, sont "en grande partie conformes".
L'Autriche et la Turquie sont "partiellement conformes" tandis que quatre sont "non conformes": Chypre, le Luxembourg, les Seychelles et les îles Vierges britanniques, où le cadre réglementaire est en place mais n'est pas appliqué.
A l'OCDE, on se garde toutefois de vouloir "marquer au fer rouge" les Etats les moins coopératifs, en expliquant: "Le seul intérêt de faire une liste, c'est qu'il faut pouvoir en sortir".
Parmi les critères retenus pour ce grand examen, dont le cœur est la coopération entre les administrations fiscales des pays: la faculté pour les administrations compétentes d'identifier les détenteurs réels de placements financiers, qui est le point le plus problématique; l'existence de comptabilités à jour; ou encore la capacité pour un fisc étranger de recevoir des données dans un délai raisonnable.
Le Forum mondial a été mis sur pied en 2000 pour faire sortir la lutte contre l'évasion fiscale du seul cadre de l'OCDE, le "club des pays riches".
Il a aussi été chargé par le G20 de prendre en charge pour les pays qui le souhaitent la mise en place de systèmes d'échanges automatiques d'informations fiscales.
Parmi les volontaires, le Liechtenstein et San Marin, qui ont signé jeudi la convention de l'OCDE sur l'assistance administrative mutuelle en matière fiscale, qui vise à un échange automatique.
Les Philippines et les Seychelles ont signé une lettre d'intention pour rejoindre bientôt la convention, ont précisé les organisateurs du Forum mondial sur la transparence fiscale, réuni jusqu'à vendredi à Jakarta. Monaco a signé une lettre semblable il y a deux semaines.
La Convention regroupe dorénavant 63 signataires mais 74 juridictions, quand on inclut les extensions territoriales, commes les îles dépendant du Royaume-Uni, ont-ils précisé.