L'Organisation internationale du travail (OIT) a appelé lundi les gouvernements à se mobiliser pour mettre en place au plus vite des mesures en faveur de l'emploi destinées à contrer une crise qui pourrait se prolonger bien après la reprise économique mondiale.
"Le monde ne peut pas se permettre d'attendre que l'emploi reparte quelques années après la reprise économique", a expliqué le directeur du secrétariat de l'OIT, Juan Somavia, en inaugurant un mini-sommet sur l'emploi réunissant une dizaine de chefs d'Etat et de gouvernement dont le Français et le Brésilien Nicolas Sarkozy et Luiz Inacio Lula da Silva.
Selon l'organisation, la crise de l'emploi, qui menace de faire exploser les chiffres du chômage dans le monde en 2009, avec jusqu'à 59 millions de sans-emploi supplémentaires par rapport à 2007, pourrait durer entre quatre et cinq ans de plus que la crise économique.
Pour contrer cette tendance, il faut de "toute urgence initier un mouvement de plus grande convergence" entre les pays, a encore expliqué M. Somavia comptant bien que le sommet soit à "même de mobiliser un leadership pour vaincre cette crise et tracer une feuille de route pour une globalisation juste offrant des opportunités de travail décent à tous".
Le secrétariat de M. Somavia (le Bureau international du travail, BIT) préconise ainsi l'adoption d'un "Pacte mondial pour l'emploi" destiné à placer les questions d'emploi et de protection sociale au coeur des gigantesques plans de relance prévus par les plus grandes économies mondiales.
Dans la lignée du BIT, le président brésilien a défendu lundi matin à Genève un nouvel ordre économique mondial, s'en prenant particulièrement aux paradis fiscaux et à la spéculation financière.
"On ne peut pas se permettre de vivre avec des paradis fiscaux, on ne peut pas continuer à vivre avec un système financier qui spécule, qui vend du papier sans produire, sans produire le moindre poste de travail, la moindre chaussure, la moindre cravate", a lancé M. Lula devant les 183 membres de l'OIT, sous un tonnerre d'applaudissement.
M. Sarkozy devrait poursuivre dans la même veine dans l'après-midi, avec, selon l'Elysée, un "discours important", présentant "sa vision du modèle social qu'il souhaite voir émerger de la crise".
Il devrait insister sur la dimension sociale de la crise, qui selon le BIT n'a pas encore été combattue à sa juste mesure.
De fait, les plans de relance gouvernementaux sont essentiellement budgétaires, ne consacrant que 10 à 15% des dépenses prévues aux mesures sociales.
Dans ses dernières prévisions les plus sombres, basées sur une contraction de l'économie mondiale de 1,3% prévue par le Fonds monétaire international (FMI), le bureau de l'OIT table sur un nombre de chômeurs record cette année, touchant 210 à 239 millions de personnes sur la planète, soit un taux de chômage compris entre 6,8 et 7,4%.
Pour le BIT, cette situation constitue une véritable bombe à retardement, portant en elle de "grands risques" de déstabilisation politique.
"Nous avons déjà constaté des signes de troubles sociaux liés au malaise économique", expliquait récemment le BIT, défendant une approche de la crise comportant "un sens élémentaire de la solidarité au sein et entre les pays" avec "assez d'attention à la dimension humaine".
Le mini-sommet sur l'emploi, qui rassemble jusqu'à mercredi ministres du Travail et représentants syndicaux, est le moment phare de la 98ème Conférence annuelle de l'OIT prévue jusqu'au 19 juin.