Le gouvernement a donné lundi son feu vert à la privatisation du groupe public SNPE, dont la filiale SME va ainsi pouvoir être reprise par la société cotée Safran afin de constituer un champion français de la propulsion des missiles et fusées.
La ministre de l'Economie Christine Lagarde a signé "le décret autorisant le transfert au secteur privé de SNPE et de ses filiales, nécessaire pour permettre la reprise de SME par Safran", a annoncé Bercy.
"Il y a un accord de principe sur une offre de reprise de SME par Safran", a indiqué à l'AFP l'entourage de la ministre.
Le groupe Safran, équipementier aéronautique et de défense dont l'Etat possède 30% du capital, a depuis longtemps manifesté son intérêt pour la reprise de SME (SNPE Matériaux énergétiques).
Le regroupement de SME et Safran, au travers de sa filiale Snecma propulsion solide (SPS), doit permettre de marier leurs compétences en regroupant les activités de propergoliste - fabricant de carburant pour les missiles et les fusées - et motoriste.
Les deux groupes travaillent notamment sur la propulsion du missile nucléaire stratégique français M51 et du lanceur Ariane 5.
"Une telle opération permettrait de consolider durablement la filière industrielle de propulsion solide, stratégique pour les applications militaires et spatiales", souligne Bercy.
Cette reprise, qui n'est pas encore finalisée à ce stade, "s'inscrirait dans le cadre de la mise en place d'un accord de coopération industrielle et commerciale", ajoute le ministère.
Contacté par l'AFP, la SNPE s'est refusée à tout commentaire et n'a pas voulu donner le détail des effectifs de la SME. Ils comprennent entre 1.000 et 2.000 personnes, répartis entre un centre de recherche dans l'Essonne et deux sites de production, à Saint-Médard (Gironde) et à Toulouse.
La nouvelle a été bien accueillie chez les salariés de Safran. "Enfin! Cela fait pratiquement dix ans que ce dossier de mise en cohérence des activités de propulsion en France était étudié", rappelle Daniel Retat, coordinateur CFDT du groupe Safran, qui juge le projet cohérent.
Ce rapprochement pourrait même être la première étape d'un regroupement dans la propulsion en Europe, qui concernerait à l'avenir l'italien Fiat Avio.
La reprise de SNPE SME "va nécessiter des rapprochements culturels et sociaux qui ne vont pas être faciles", ajoute toutefois M. Retat.
Après la cession du pôle chimie fine Isochem en février et celle envisagée de sa filiale de nitrocelluloses, Bergerac NC, "c'est la SNPE qui se réduit à peau de chagrin", a regretté de son côté Thierry Colin, délégué CGT de la SNPE.
Le syndicaliste est persuadé que ce rapprochement aura "des conséquences sur l'emploi". "Safran a déjà annoncé la couleur: il va y avoir des réorganisations, des doublons", notamment entre l'usine SME de Saint-Médard et celle de Snecma du Haillan, toutes deux en Gironde, indique-t-il.
Les négociations avec Safran doivent prendre en compte la question des passifs environnementaux de terrains pollués de la SNPE. "A notre sens, l'Etat va se porter garant sur beaucoup de choses" pour leur dépollution, anticipe M. Colin.
Safran, issu de la fusion en 2005 du motoriste Snecma et de Sagem, est par ailleurs sur les rangs pour racheter l'entreprise américaine d'identification L-1 et a aussi publiquement manifesté son intérêt cet été pour un rapprochement avec l'équipementier aéronautique Zodiac, qui est opposé au projet.