Devant des ouvriers qui ont constitué son coeur de cible en 2007, Nicolas Sarkozy a annoncé vendredi que deux navires de guerre destinés à la Russie seraient construits à Saint-Nazaire par les chantiers navals STX, actuellement en grande difficulté. La France avait fait savoir en février dernier qu'elle étudiait une demande russe pour quatre bâtiments de ce type. Un accord de principe avait été pris pour la construction d'un premier navire mais rien n'avait été confirmé.
"Avec nos amis russes vous allez fabriquer les deux BPC. Le contrat, on est en train de le négocier, mais la décision de le faire elle est certaine", s'est engagé le chef de l'Etat devant quelque 300 ouvriers, dans une mise en scène étudiée.
Comme au plus fort de la dernière campagne présidentielle, le président était seul, micro en main et sans notes, sur une estrade installée au pied d'un impressionnant navire militaire en construction, le Dixmude, destiné à la Marine nationale.
Les anciens chantiers de l'Atlantique construiront donc pour la Russie deux bâtiments de projection et de commandement (BPC) de classe Mistral pouvant transporter jusqu'à 900 hommes, des hélicoptères et des chars d'assaut.
Le matin même pourtant, le patron des chantier navals Jacques Hardelay se voulait beaucoup plus prudent. "On est dans le planning de négociation", avait-il confié à la presse.
Après l'annonce présidentielle, plusieurs responsables syndicaux ont d'ailleurs indiqué qu'ils attendaient encore "une décision définitive". "On espère que ça débouchera", avance ainsi Johan Jardin, délégué CFDT.
La commande de deux nouveaux BPC est susceptible de donner une bouffée d'oxygène à des chantiers de l'Atlantique dont l'activité est en forte baisse avec la crise économique et après la livraison en juin du Norwegian Epic, le plus gros paquebot jamais construit à Saint-Nazaire.
Ils achèvent actuellement le Dixmude, dont la construction a été anticipée dans le cadre du plan de relance, et qui sera livré à l'armée en avril 2011.
Par ailleurs, la société italienne MSC a officiellement confirmé vendredi la commande d'un paquebot de croisière de 1.750 cabines et un équipage de 1.300 hommes pour un montant de 570 millions d'euros. Sa livraison est prévue en mai 2012.
Autre commande assurée: celle d'un paquebot de croisière par les Libyens signé le mois dernier, du même type que le "Fantasia" des Italiens mais d'une capacité supérieure, qui devrait être livré en décembre 2012.
Mais au final, ces trois commandes fermes n'assurent que deux ans de travail aux salariés, a indiqué M. Hardelay. L'entreprise n'entend pas ainsi interrompre le plan de départs volontaires de 351 personnes qui n'a pas obtenu le succès attendu et qui est prolongé jusqu'en octobre.
Selon la direction, 175 ouvriers se sont à ce jour portés volontaires et l'entreprise a toujours recours à du chômage partiel. Les ex-chantiers de l'Atlantique emploient aujourd'hui 2.350 personnes et font travailler autant de personnel chez les sous-traitants.
Nicolas Sarkozy, qui a rencontré les organisations syndicales, a promis que l'Etat, qui est entré dans le capital de STX en 2008 à hauteur de 33%, ne se désengagerait pas tant "que l'entreprise aura besoin de nous".
"C'est stratégique pour la France. Jamais je ne laisserai fermer le chantier", a déclaré le chef de l'Etat qui a tenu à rappeler qu'il venait là "pour la quatrième fois" et qu'il n'accepterait en aucun une "délocalisation" de l'activité.