Les gouvernements américain et suisse disposent de quelques semaines pour trouver un accord sur le secret bancaire, avant que la justice se saisisse en août du conflit entre la banque suisse UBS et le fisc américain, qui exige de savoir l'identité de 52.000 titulaires de comptes anonymes.
"C'est une bonne chose que les gouvernements s'engagent dans des discussions intenses et essaient de négocier une solution", a commenté lundi UBS dans un communiqué.
De fait, une affaire qui a commencé comme un simple litige entre une entreprise et le fisc a pris le niveau d'une négociation d'Etat, car l'affaire dépasse le simple cadre des agissements de la banque pour concerner l'affrontement de deux systèmes de droit, avec d'un côté le secret bancaire qui est la pierre angulaire de la puissance financière suisse, et de l'autre le droit américain, qui exige que tout ressortissant américain déclare ses avoirs et revenus, où qu'ils se trouvent, et acquitte ses impôts.
Lundi, à l'heure où aurait dû s'ouvrir un procès à Miami (Floride, sud-est des Etats-Unis), les avocats de la banque et les représentants des deux gouvernements ont en fait formellement demandé au juge que la procédure ne débute que le 3 août.
Il s'agit, avaient-ils expliqué dans une motion publiée dimanche, de "permettre aux deux gouvernements de poursuivre leurs discussions afin d'arriver à une solution dans cette affaire".
"Les deux gouvernements sont en pourparlers et nous ne voulons pas faire obstruction", a déclaré lundi l'avocat d'UBS, Eugene Stearns.
Il n'a fallu que sept minutes pour que le juge Alan Gold accepte cette requête. "Je suis prêt à accorder ce report et à encourager de telles négociations", a-t-il dit.
Pour UBS, qui avait déjà tenté d'apaiser le fisc en acceptant en février de verser 780 millions de dollars d'amendes et de livrer les noms de quelques centaines de clients, l'enjeu est énorme, alors que la banque est en difficile position financière et perd déjà des capitaux.
Des informations de presse ont révélé que la banque préfèrerait payer une lourde amende plutôt que de renoncer définitivement au secret, auquel la tient le droit suisse. Les sommes acquittées pourraient être énormes, puisque selon la justice américaine les comptes en question pourraient receler quelque 14,8 milliards de dollars.
"Mais cela ne répond pas aux préoccupations du gouvernement américain, qui veut s'assurer que ses citoyens paient leurs impôts", souligne l'avocat Jacob Frenkel, un ancien procureur américain spécialisé dans les fraudes.
"Je ne crois pas que le gouvernement américain puisse tolérer, quel que soit le règlement (qui puisse être trouvé), le maintien d'un monde où les institutions financières européennes jouent à cache-tampon", explique de son côté un fiscaliste de Washington ayant travaillé pour le fisc américain, qui a demandé à garder l'anonymat.
"Il faut une victoire aux Américains, et une victoire ne consiste pas à ruiner UBS, la victoire c'est que les autorités obtiennent les données", ajoute ce juriste.
La semaine dernière, Berne a annoncé qu'il serait prêt à prendre "toutes les mesures nécessaires", y compris en procédant à la saisie de données, pour empêcher UBS de livrer des informations sur des clients en violation de la loi suisse protégeant le secret bancaire qu'elle serait prêt à saisir.
Le gouvernement américain a été sommé par le juge Gold de révéler comment il riposterait dans un tel cas de figure.