par Claude Canellas
BORDEAUX (Reuters) - L'ex-majordome Liliane Bettencourt Pascal Bonnefoy, poursuivi pour avoir enregistré clandestinement des conversations de la milliardaire en 2009-2010, est jugé de mardi à jeudi à Bordeaux aux côtés de cinq journalistes qui en ont publié des extraits.
C'est le quatrième volet de la tentaculaire "affaire Bettencourt", qui mêle accusations d'abus de faiblesse sur la personne de l'héritière de L'Oréal et soupçons de trafic d'influence et de financement politique occulte, sur fond de conflit familial.
L'ex-majordome, aujourd'hui âgé de 52 ans, avait capté une vingtaine d'heure de conversations au domicile de Liliane Bettencourt en plaçant un dictaphone derrière son fauteuil.
Ces enregistrements sont devenus un support essentiel de "l'affaire Bettencourt" quand la fille de la milliardaire, Françoise Bettencourt-Meyers, les a transmis sous forme de CD-roms par un coursier à la brigade financière le 10 juin 2010.
Le conflit entre la mère et la fille, qui a déposé une plainte pour "abus de faiblesse" en décembre 2007 à l'encontre du photographe et confident de la milliardaire, François-Marie Banier - plainte classée sans suite en septembre 2009 - a abondamment défrayé la chronique médiatique.
C'est l'objet de ce procès, où l'ex-majordome est poursuivi pour "atteinte à l'intimité de la vie privée" et les cinq journalistes pour la détention et la diffusion de "documents portant atteinte à l'intimité de la vie privée", des faits passibles d'un an de prison et de 45.000 euros d'amende.
"STRICT DEVOIR D'INFORMATION"
Parmi ces derniers figurent le directeur de publication de Mediapart, Edwy Plenel, celui de l'hebdomadaire Le Point à l'époque des faits, Franz-Olivier Giesbert, et les journalistes qui ont fait état du contenu des enregistrements, Fabrice Arfi et Fabrice Lhomme pour Mediapart, Hervé Gattegno, du Point.
Tous disent avoir agi dans le cadre de leur "strict devoir d'information" et assurent n'avoir pas diffusé les passages concernant la vie privée de Liliane Bettencourt.
Le contenu de ces enregistrements a alimenté l'instruction, notamment à l'encontre de François-Marie Banier.
Dans le volet principal de l'affaire, celui des abus de faiblesse, huit personnes ont été condamnées. Seul l'homme d'affaires Stéphane Courbit n'a pas fait appel de sa condamnation à 250.000 euros d'amende.
L'ancien gestionnaire de fortune Patrice de Maistre s'est pour sa part désisté de son appel après avoir trouvé un accord transactionnel avec le tuteur de la milliardaire et la famille Bettencourt-Meyers.
Il avait été condamné le 28 mai par le tribunal correctionnel de Bordeaux à une peine de 30 mois de prison dont un an avec sursis et à 250.000 euros d'amende, ainsi qu'à verser 12 millions d'euros de dommages et intérêts à l'héritière de l'Oréal.
Dans le volet trafic d'influence du dossier, Patrice de Maistre et l'ancien ministre UMP Eric Woerth ont été relaxés.
Dans celui de la violation du secret professionnel, la juge Isabelle Prévost-Desprez a également été relaxée mais le parquet a fait appel.
(Edité par Emmanuel Jarry)