PARIS (Reuters) - La réforme de la carte des régions en France aura un effet limité sur leurs finances et leur notation à court terme mais pourrait accroître les inégalités à long terme, même si elle offre des perspectives de financement intéressantes, estime S&P.
Il est en revanche trop tôt pour dire quelles économies le passage de 22 à 13 régions pourrait générer, selon l'agence de notation. Le gouvernement a avancé ce mois-ci le chiffre de 10 milliards d'euros.
Dans une étude parue mardi, Standard & Poor's souligne d'abord que la place des régions restera marginale en France en comparaison avec les voisins européens, malgré un quasi-doublement du budget moyen et une augmentation de la population de 2,9 à 5 millions de personnes en moyenne.
Leurs compétences étant relativement restreintes par rapport aux régions allemandes, belges, italiennes ou espagnoles, leur poids demeure assez faible : le budget de l'ensemble des régions françaises en 2014 était de 25,5 milliards d'euros contre 23,1 pour la seule Lombardie ou 23,3 pour la Catalogne.
Ces domaines d'intervention devant peu évoluer dans un premier temps, même si les régions récupèrent les transports scolaires ou centralisent le développement économique, S&P table sur une hausse de budget de 10%, en une fois.
S&P souligne que "les budgets des régions françaises sont moins exposés aux caractéristiques démographiques et socio-économiques que leurs pairs européens notés", notamment parce qu'elles paient peu de salaires et pas de prestations sociales.
Si elles sont un peu plus sensibles aux cycles économiques en terme de recettes, la volatilité devrait rester limitée.
INTERROGATION SUR LES ÉCONOMIES
Leur niveau d'endettement est jugé élevé, à 109% des recettes (hors Ile-de-France) en 2015 avec une progression attendue jusqu'à 134% en 2017, mais S&P rappelle que les régions comptent pour seulement 1,1% de la dette publique.
Avec la baisse des dotations de l'Etat dans le cadre du plan d'économies de 50 milliards d'euros sur la période 2015-2017, le taux d'épargne brute des collectivités devrait baisser et S&P s'attend à voir les régions ajuster l'effort d'investissement.
Si la note de crédit des régions notées par S&P ne devrait pas bouger à court terme au vu de ces éléments, des questions se posent en revanche sur les perspectives à plus long terme.
Ses analystes estiment que la capacité à bien gérer les fusions en termes d'organisation et de systèmes, à digérer les nouvelles compétences et à réaliser des économies d'échelle sera décisive et pourrait être inégale d'une région à l'autre.
La nature des économies potentielles est mal connue mais S&P pense que les sources se trouvent dans la renégociation des contrats importants, comme les conventions sur les TER avec la SNCF, ou l'harmonisation d'intervention dû à la refonte de la carte - proximité de lycées - ou aux nouvelles compétences.
"On n'a pas vu encore d'études qui permettent de dire qu'il y aurait des économies d'échelle", a rappelé Valérie Montmaur, analyste, lors d'une conférence de presse.
Le redimensionnement possible des projets d'investissement et donc le recours à l'emprunt - public ou privé - durant la nouvelle mandature pourraient aussi peser sur la notation.
Mais S&P juge intéressant que l'accès aux marchés obligataires soit renforcé alors qu'une majorité des 22 régions ne s'y rendaient pas, en l'absence d'ingéniérie adaptée ou parce que le montant des projets n'était pas assez important.
Les analystes soulignent ainsi que l'Ile-de-France, première région du pays, est capable de lever 500 millions d'euros sur un emprunt obligataire, au niveau d'autres opérations en Europe.
(Gregory Blachier, édité par Yves Clarisse)