Les salariés de l'équipementier automobile allemand Continental dans le Midi étaient appelés lundi par leur direction à se prononcer sur un marché que les principaux syndicats dénoncent comme un chantage: accepter des sacrifices salariaux contre la garantie de l'emploi.
Les 2.500 salariés des trois sites de Continental Automotive France en Midi-Pyrénées avaient le choix entre participer à la consultation organisée par la direction ou la boycotter, comme les y ont appelés la CGT et la CFDT, qui représentent environ 60% du personnel.
Le vote dans les trois usines de Toulouse, Boussens (Haute-Garonne) et Foix (Ariège), qui fabriquent des composants électroniques pour les constructeurs automobiles, devait s'achever à 18H00. Les résultats étaient attendus dans la soirée.
Pour la direction, le plan est vital pour la survie des trois sites, non pas à très court terme puisque Continental Automotive est une entreprise profitable, mais au-delà parce que les usines vont au devant d'une baisse alarmante de leurs commandes en 2012 et 2013 selon elle.
Pour la CGT et la CFDT, il ne s'agit que d'augmenter les bénéfices de Continental sur le dos des travailleurs. La consultation, ajoutent-elles, vise seulement à contourner les syndicats majoritaires et participe d'un "dumping social" mettant en concurrence les sites européens de Continental.
"Non au chantage à l'emploi", proclamait une banderole tendue à l'entrée du site de Toulouse, devant lequel environ 200 salariés des trois usines manifestaient en début d'après-midi.
"De toute façon, ce seront des résultats bidon après une consultation bidon", a dit Olivier Grimoux, un délégué CGT de Foix où, comme à Boussens, son organisation et la CFDT avaient appelé à débrayer pour aller manifester et saucissonner à Toulouse, avant une assemblée générale du personnel dans l'après-midi.
Si la CGT et la CFDT refusaient de reconnaître tout fondement légal à la consultation, le suivi de l'appel au boycott représentait un enjeu important. De l'aveu du syndicaliste CFDT Sami Hamida, voter ou ne pas voter (avec le risque que le "oui" au plan de la direction ne l'emporte), c'est "la grosse discussion du moment" entre salariés.
Les autres syndicats ont appelé à voter, et on ignorait à midi quelle était la participation dans des sites où l'accès était interdit aux non-salariés.
Le marché est le suivant, selon la direction: réduire le coût du travail de 8% en gelant quasiment les augmentations de salaire en 2011, en diminuant fortement la prime d'intéressement et en supprimant deux jours de RTT par an jusqu'en 2015. En contrepartie, la direction de Continental en Allemagne s'engage à maintenir la charge de travail jusqu'en 2015.
En fait, dit la CFDT, l'ensemble des mesures proposées par la direction représente une baisse nette du salaire de 1,4%, la suppression de diverses primes, une diminution drastique de l'intéressement, entre 8 et 13 jours de travail de plus et la suppression de plus de 100 postes d'intérimaires et sous-traitants. Quant aux contreparties, il n'y a rien de chiffré en termes d'emplois et d'investissements, dit-elle.
L'accord se ferait "au détriment des acquis sociaux des salariés" alors qu'il y a "énormément de travail" dans son usine, dit Monique Rey, déléguée CFDT de Boussens.
Véronique Eucat, porte-parole de Continental Automotive, concède que les usines "fonctionnent très bien, on va même faire encore des bénéfices cette année". Mais, au vu des commandes, "nous aurons vraiment un manque très fort pour remplir nos productions en 2012, 2013", dit-elle.
Elle réfute tout chantage. "Attention, dit-elle, même si ça va bien aujourd'hui, ça va aller mal en 2012, 2013. Prenons tout de suite les devants, n'attendons pas que d'autres s'occupent de nous. Le jour où le siège en Allemagne s'occupera de nous, ce sera trop tard".