A Marseille, les commerçants du centre-ville résistent contre l'ouverture des magasins le dimanche et l'inauguration prochaine d'un nouveau centre commercial qui pourrait bénéficier d'une autorisation d'ouverture dominicale, a mis le feu aux poudres.
A deux pas du monumental stade Vélodrome, dans un nouvel ensemble résidentiel récemment jailli de terre, les 50 boutiques du centre commercial du Prado de 23.000 m2 s'apprêtent à ouvrir leurs portes fin mars.
Dans une cité qui compte au moins cinq centres du même genre, la colère des commerçants du centre-ville contre la nouvelle structure a été ravivée par le vote du conseil municipal, le 12 février, de l'extension aux quartiers Sud de Marseille de la Zone touristique internationale (ZTI) où se situe le nouveau complexe du Prado.
Une décision qui permettra aux futurs magasins d'ouvrir le dimanche et en soirée jusqu'à minuit, en vertu de la loi Macron d'août 2015. Ce qui passe d'autant plus mal que quasiment aucun commerce de l'hyper centre n'est ouvert le dimanche dans la deuxième ville de France.
"Il ne se passe rien, c'est désert le dimanche, pourquoi ouvrir ? On travaille déjà six jours sur sept de 9H00 à 19H00... On n'est pas des machines, on peut au moins avoir un jour en famille", témoigne Pierre qui tient un tabac dans l'unique rue piétonne du centre-ville.
En juillet, les partenaires sociaux marseillais avaient signé un avenant permettant l'ouverture dominicale des magasins restreinte au centre à la condition que soit mis en place un plan d'actions (animations, développement des transports en commun, piétonnisation, baisse des tarifs des parkings) pour relancer le commerce en souffrance.
Or ce plan d'actions "n'est pas abouti" et ne permet pas d'ouvrir le septième jour de la semaine, estiment la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME 13), l'union des entreprises de proximité, l'UPE13, la CFE-CGC, le CFDT, la CFTC et FO. Vent debout contre la décision "unilatérale et sans concertation" prise par la mairie, les signataires d'un communiqué commun lui reprochent d'avoir "brûlé les étapes".
"Nous ne sommes pas contre l'ouverture du dimanche, mais avant d'étendre la zone il faudrait déjà régler le problème du centre-ville", déplore Alain Gargani, président de la CPME 13, alors que le taux de rideaux baissés atteint 27 % et 28 % dans certains quartiers, selon une récente étude commandée par la mairie.
- 'Dans le sens de l'Histoire' -
"Un paquebot comme le centre commercial qui s'apprête à ouvrir, s'il n'a personne la semaine mais du monde le dimanche ce n'est pas un problème, il peut s'équilibrer. Un petit commerce, ce n'est pas la même chose. Il a besoin de tourner du lundi au samedi, le dimanche ne suffit pas à éponger une semaine sans clients", souligne Marie Bagnoli, vice-présidente de l'Union pour les entreprises des Bouches-du-Rhône (UPE 13), représentant local du Medef.
La mairie de Marseille relève au contraire à quel point il "est très important pour une ville touristique comme Marseille d'ouvrir le dimanche notamment pour les croisiéristes" qui débarquent dans la ville.
"Toutes les grandes métropoles le font, l'ouverture du dimanche va dans le sens de l'Histoire", affirme l'adjointe au commerce, Solange Biaggi (LR) qui veut rendre la cité phocéenne "encore plus attractive". "Les petits commerces et les grandes enseignes ne sont pas en concurrence directe", insiste l'adjointe.
La mairie, dont la décision a été soumise au préfet qui a trois mois pour se prononcer, se dit "optimiste au vu de l'élection d'Emmanuel Macron". Les commerçants ont, eux, demandé au représentant de l’État de "surseoir à sa décision et de convenir d'un calendrier plus adéquat" alors que la saison estivale se prépare.
Le tribunal administratif de Paris a annulé récemment un arrêté de 2015 créant la Zone touristique internationale dite "Olympiades", dans le 13e arrondissement, rappelle M. Gargani.