Air France, Sanofi, Carrefour, Bouygues Télécom ou dernièrement Veolia: de plus en plus d'entreprises ont recours aux plans de départs volontaires pour réduire leurs effectifs, une procédure moins brutale que les licenciements, mais à manier avec précaution, selon les juristes.
Le processus est "beaucoup moins traumatisant pour les salariés que de partir dans le cadre d'un licenciement", explique à l'AFP Me Déborah David, du cabinet JeantetAssociés, qui y voit également un avantage pour les entreprises en termes d'image.
Pour la juriste, la montée en puissance de ces plans est également liée au fait que les plans de sauvegarde de l'emploi (plans sociaux) deviennent "très difficiles à mettre en oeuvre", leur motif économique étant souvent contesté.
Le plan de départs volontaires (PDV) est "plus souple" et ne s'accompagne pas nécessairement d'obligations de reclassement lorsqu'il n'implique aucun licenciement.
Dans le cadre d'un PDV, l'entreprise ouvre un guichet pour les salariés prêts à rompre leur contrat à l'amiable.
Les modalités d'un tel plan ne sont pas inscrites dans le code du travail, mais sont "une construction de la jurisprudence", selon Me Sylvain Niel, du cabinet Fidal.
Il existe deux types de PDV: les plans "autonomes" ne prévoyant pas de licenciements, quel que soit le nombre des volontaires, et ceux inscrits dans le cadre d'un plan social, couvrant tout ou partie des suppressions de postes.
Dans le second cas, le PDV peut se conclure par des licenciements si les objectifs ne sont pas atteints.
Selon le ministère du Travail, "entre 11 et 15%" des plans sociaux "sont exclusivement des plans de départ volontaires" et beaucoup d'autres contiennent une part de volontariat.
Risque d'effets pervers
La grande différence entre volontariat et licenciement réside dans le fait que les partants ne sont pas désignés selon des "critères d'ordre" (âge, situation familiale, ancienneté, etc.), "ce qu'il y a de plus violent", selon Me Niel.
Les PDV sont souvent assortis de "mesures financières extrêmement généreuses" et "beaucoup plus faciles à négocier" avec les représentants du personnel. Le caractère amiable du départ rend aussi les contestations plus difficiles, selon le juriste.
Judith Krivine, avocate au cabinet Dellien ("côté salariés"), identifie une troisième forme de PDV, dans laquelle les entreprises proposent au salarié un "choix" entre une mobilité ou un départ.
Dans ce cas, l'entreprise fait "semblant de faire du volontariat parce que c'est plus joli" et omet de dire qu'en réalité elle supprime des postes.
L'employeur tente d'échapper au PSE et en particulier au plan de reclassement et cela peut entraîner "des réaffectations forcées" aux conséquences "catastrophiques" pour les salariés, dit-elle.
Un PDV mal ficelé peut aussi aboutir au départ de salariés non souhaités ou à un trop-plein de candidats.
Estelle Sauvat, du cabinet Sodie, souligne que "trop inciter conduit certains salariés à regretter de ne pas être dedans" et relève que certains plans entraînent le départ de "toute la compétence".
Pour Me David, le PDV est "à double-tranchant" sur le plan de l'image si le nombre des candidatures excède celui des postes proposés.
A la Société générale, un plan portant sur 880 postes a suscité l'intérêt de quelque 2.000 personnes.
Depuis la fin de ce PDV, un élu CGT dit avoir "observé une augmentation des démissions" et relève que "la direction a perdu pas mal de crédibilité".
Chez Bouygues Télécom (plan jusqu'au 31 janvier visant 556 postes), il y a aussi déjà un excès de dossiers pour certaines catégories de personnel.
Les juristes soulignent par ailleurs la nécessité de bien préparer le plan pour veiller à ce que ceux qui restent conservent des conditions de travail décentes.