par Julien Ponthus
PARIS (Reuters) - Crédit agricole S.A. (CASA) a annoncé mardi envisager un bouleversement de la structure capitalistique du groupe bancaire mutualiste avec le transfert de sa participation de 25% dans les caisses régionales vers une entité détenue par ces dernières.
L'opération simplifierait la structure complexe du groupe en mettant un terme à l'actionnariat croisé entre le véhicule coté en Bourse et les 39 caisses régionales.
Elle transformerait aussi profondément la nature de l'action Crédit agricole, qui, privée d'une partie de son exposition à la banque de détail en France, prendrait un profil un peu plus proche de celui de Natixis, la banque d'affaires cotée de son cousin mutualiste BPCE.
Attendue depuis des mois, la réforme de la structure du Crédit agricole a pris un tour inattendu par son ampleur, alors que les investisseurs attendaient dans un premier temps une réorganisation de l'organe central du groupe, actuellement logé au sein de CASA.
L'agence de presse Bloomberg a écrit lundi soir que le groupe bancaire envisageait une transaction intragroupe évaluée à 17 milliards d'euros qui permettrait à CASA de renforcer ses coussins de fonds propres. L'opération, selon Bloomberg, pourrait être annoncée en mars, mois au cours duquel le groupe doit présenté son plan stratégique 2020.
CASA "confirme mener des réflexions visant à la réalisation éventuelle d'une opération consistant en un reclassement intragroupe des certificats coopératifs d'associés et de certificats coopératifs d'investissement (les CCA/CCI) qu'il détient auprès d'une entité dédiée, intégralement détenue par les caisses régionales", écrit le groupe dans un communiqué publié à l'ouverture de la Bourse.
"UNE BONNE NOUVELLE"
CASA a indiqué que les conditions financières d'une éventuelle opération n'avaient pas encore été fixées.
"C'est une bonne nouvelle. La complexité de la structure était très critiquée et ce depuis longtemps par les investisseurs. Cette simplification est salutaire", commente un analyste de marché basé à Paris.
Chahutée depuis le début de l'année, l'action bénéficie de l'annonce et prend 4,48% à 9,465 euros à 13h10, surperformant les valeurs bancaires européennes (+1,99% pour l'indice sectoriel Stoxx).
Si cette transaction est neutre pour la solvabilité de l'ensemble du groupe, elle est favorable à CASA car elle annule les mécanismes de transferts (switch) intragroupe et renforce ainsi la qualité de son capital.
Alors que le groupe Crédit agricole bénéficie, grâce à la contribution des caisses régionales, d'un ratio de fonds propres élevé - CET 1 non phasé de 13,4% au 30 septembre 2015 - celui de CASA ne s'élevait à cette date qu'à 10,3%.
L'opération serait aussi favorable aux actionnaires de CASA en termes de dividende.
La politique de distribution de 50% des profits serait confortée, a souligné la banque dans son communiqué, ajoutant qu'elle "permettrait le retour à un paiement du dividende exclusivement en numéraire dès la distribution au titre de l'exercice 2016".
Lors de la publication de ses résultats trimestriels en novembre, CASA n'avait pas été en mesure d'offrir de visibilité sur son projet de réorganisation de l'organe central (ROC), très attendu par les investisseurs.
La direction de la 'banque verte' avait déjà déçu les marchés lors de la présentation de ses résultats semestriels le 4 août, quand elle avait annoncé qu'en raison de contraintes non levées avec la Banque centrale européenne aucune opération n'était pour l'heure envisageable.
Le groupe a néanmoins commencé à réorganiser sa gouvernance en regroupant trois organes sous une présidence unique. Dominique Lefebvre, élu président de CASA, cumule la présidence de l'entité cotée et celles de l'organe politique, la Fédération nationale du Crédit Agricole (PA:CAGR) (FNCA) et de la SAS Rue La Boétie, où est logée la participation de 56,5% des caisses régionales dans la structure cotée.
Le groupe avait évoqué l'idée de créer une structure au niveau du groupe Crédit agricole qui fusionnerait SAS Rue La Boétie, l'organe central de Crédit agricole SA et la FNCA.
(Avec Alexandre Boksenbaum-Granier, édité par Dominique Rodriguez)