PARIS (Reuters) - Un total de 345 hommes et femmes de nationalité française partis dans la zone irako-syrienne sont rentrés à ce jour en France, ainsi que 58 enfants, et sont soit écroués soit surveillés par les services de renseignement, a dit mercredi Gérard Collomb, qui se veut rassurant sur les craintes d'un retour "massif".
La BBC a révélé lundi que les Forces démocratiques syriennes (FDS), alliance de milices arabes et kurdes, avaient scellé un accord avec l'Etat islamique, avec l'aval tacite de la coalition internationale, pour la prise de la ville syrienne de Rakka en octobre dernier qui a permis l'évacuation de plusieurs dizaines de combattants de l'EI armés parmi les civils.
Selon la radio-télévision britannique, 4.000 personnes auraient ainsi été convoyées le 12 octobre en direction de la frontière irako-syrienne. Un témoin a fait état de Français parmi les fuyards. Un présumé djihadiste français interrogé par la BBC affirme que des Français "sont repartis pour la France mener de nouvelles attaques".
Le ministre de l'Intérieur a été interpellé à ce sujet mercredi par le groupe Les Républicains lors des questions d'actualité à l'Assemblée.
"Il n'y a pas un retour massif et (les revenants) sont évidemment incarcérés quand ils ont commis des faits criminels en Syrie et en Irak", a-t-il répondu.
"Nous estimons le nombre de départs sur zone à 1.200 personnes majeures ou résidant en France depuis 2012. (...) Nous pensons que 700 personnes sont encore présentes sur zone", a-t-il rappelé.
"PAS VRAIMENT DE TRI"
S'agissant de ceux qui sont revenus en France, il y a 178 hommes "dont les deux tiers sont aujourd'hui écroués, soit 120, et dont le reste fait (l'objet) d'un suivi de la part de la DGSI et de nos services de renseignement", a précisé Gérard Collomb.
"Il y a 167 'returnees' (terme anglo-saxon-NDLR) féminines qui sont aujourd'hui suivies par la justice, dont 15 sont écrouées. Les autres sont suivies par la DGSI. Enfin, avec la ministre de la Justice, nous suivons les mineurs qui sont au nombre de 59."
Fin octobre, le ministre de l'Europe et des Affaires étrangères, Jean-Yves Le Drian, avait reconnu avec une pointe d'amertume un "accord local" ayant "permis à certains djihadistes de fuir en échange d'une accélération de la reprise de Rakka".
"Mais ils n'iront pas très loin", avait-il assuré dans Le Journal du Dimanche du 21 octobre. "Ils se regrouperont dans un dernier réduit qui, lui aussi, finira par tomber et ce sera la fin de l'organisation Daech en Syrie."
La ministre des Armées, Florence Parly, a répété mercredi sur France 24 que les forces françaises déployées au Levant ne faisaient "pas vraiment de tri" des djihadistes sur le terrain.
"C'est une guerre qui se mène contre des terroristes et nous ne demandons pas leur carte d'identité à ces gens-là donc nous agissons, si je puis dire, tous azimuts", a-t-elle déclaré.
"Aujourd'hui il y a un certain nombre de ces djihadistes qui se sont dissimulés dans la clandestinité. Nous sommes évidemment attentifs à leurs mouvements et nos services de renseignement jouent tout leur rôle", a-t-elle ajouté.
La Turquie a déclaré mardi soir que l'information de la BBC était "grave et édifiante" et démontrait selon elle le risque de "combattre une organisation terroriste en s'aidant d'une autre". Ankara considère comme "terroristes" les milices kurdes combattant au sein des FDS.
Le colonel américain Ryan Dillon, porte-parole de la coalition internationale, a reconnu mardi que de possibles combattants de l'EI - quelque 300 - avaient quitté Rakka dans ce convoi, qui a été surveillé par des drones de la coalition.
(Cyril Camu, édité par Sophie Louet)