par Maher Chmaytelli et Stephen Kalin
BAGDAD/BARTELLA, Irak (Reuters) - Le groupe Etat islamique a lancé de nouvelles attaques lundi, dans l'ouest de l'Irak, pour tenter d'alléger la pression de l'armée irakienne et des forces kurdes qui resserrent l'étau autour de Mossoul, dernier grand bastion des djihadistes dans le pays.
Selon le service de presse de l'armée de Bagdad, les forces pro-gouvernementales ont repris près de 80 villages autour de Mossoul depuis le début de leur offensive il y a une semaine et sont désormais aux portes de la ville où le chef de l'EI, Abou Bakr al Baghdadi, a proclamé son "califat" il y a deux ans.
La bataille de Mossoul devrait véritablement débuter lorsque les forces pénétreront dans les rues étroites de la ville qui compterait encore quelque 1,5 million d'habitants, dont seulement quelques milliers ont pour l'instant pu s'échapper.
Faute de pouvoir empêcher la progression des militaires irakiens, au sud et à l'est de la ville, et des forces kurdes, au nord-est et au nord, les djihadistes ont lancé lundi de nouvelles attaques de diversion.
Après avoir attaqué Kirkouk vendredi, l'EI est passé à l'offensive dimanche à Routba, une ville située dans la province majoritairement sunnite d'Anbar, près de la frontière syrienne, et lundi à Sindjar, à l'ouest de Mossoul.
Selon Mahma Xelil, un responsable yazidi de la province de Ninive, l'attaque à Sindjar, qui a impliqué un véhicule piégé conduit par un kamikaze, a été la plus violente lancée par les djihadistes depuis un an dans cette région où ils s'étaient livrés à des atrocités de grande ampleur contre les yazidis il y a deux ans.
Elle a néanmoins été repoussée par les peshmergas kurdes, qui ont tué 15 assaillants et détruit plusieurs de leurs véhicules, a dit Mahma Xelil à Reuters.
L'EI affirme de son côté avoir détruit deux véhicules des forces kurdes et tué tous leurs occupants.
A Routba, une ville située sur la route reliant la Syrie à la Jordanie, à 360 km à l'ouest de Bagdad, des renforts de la police fédérale ont été envoyés dans la nuit de dimanche à lundi pour appuyer les unités locales, a-t-on appris de sources sécuritaires.
Selon ces sources, sept policiers et 16 djihadistes ont été tués jusqu'à présent dans les combats. L'EI dit avoir mis en fuite des dizaines de membres des services de sécurité et des forces tribales sunnites alliées au gouvernement de Bagdad.
L'ARMÉE À 5 KM DE MOSSOUL
Ces attaques ont peu de chance de faire dérailler l'offensive sur Mossoul, à laquelle participent quelque 30.000 soldats irakiens et peshmergas kurdes. La ville serait défendue par quelques milliers de djihadistes.
De nombreux pays étrangers sont aussi impliqués dans les opérations, soit en fournissant un appui principalement aérien sous le parapluie de la coalition internationale formée par les Etats-Unis, comme la France et la Grande-Bretagne, soit au sol comme la Turquie.
Ankara, qui a formé des combattants sunnites dans le camp de Bachika, au nord de Mossoul, mais dont le gouvernement de Bagdad a publiquement décliné l'aide, a néanmoins affirmé lundi que ses tirs d'artillerie avaient tué 17 djihadistes depuis le début de l'offensive.
Le chef de la diplomatie turque, Mevlut Cavusoglu, a ajouté pendant une conférence de presse conjointe avec son homologue français Jean-Marc Ayrault que quatre chasseurs F-16 étaient prêts à appuyer les troupes au sol.
La Turquie est inquiète de voir les Kurdes étendre encore leur influence dans cette région qui appartenait autrefois à l'empire ottoman.
A l'est de Mossoul, l'armée irakienne poursuit de son côté sa reconquête d'une région majoritairement chrétienne dont presque toute la population a fui depuis qu'elle est tombée sous le joug de l'EI il y a deux ans.
Après avoir repris Qaraqosh samedi, l'unité d'élite de l'armée, le service de contre-terrorisme (CTS), a poussé son avantage et reconquis lundi matin trois villages à l'ouest d'une autre ville chrétienne, Bartella.
Les militaires sont désormais aux portes du village de Bazouaïa, à seulement cinq à sept kilomètres des premières habitations de Mossoul, a déclaré à Reuters le général Abdel Ghani al Assadi.
D'après le service de presse de l'armée irakienne, 770 djihadistes ont été tués en une semaine, et 23 capturés. Les forces gouvernementales ont aussi détruit 127 véhicules piégés conduits vers leurs positions par des kamikazes.
L'EI affirme pour sa part avoir tué des centaines de combattants ennemis et bloqué leur progression.
(Avec Saïf Hameed; Tangi Salaün pour le service français)