par Jan Strupczewski et Balazs Koranyi
BRUXELLES/FRANCFORT (Reuters) - L'inflation en zone euro est passée en territoire négatif pour la première fois en six mois, ce qui augmente la pression pesant sur la Banque centrale européenne afin qu'elle muscle son programme de rachat d'actifs pour réveiller les prix.
Les prix à la consommation dans l'union monétaire ont baissé de 0,1% sur un an en septembre, montre la première estimation publiée mercredi par Eurostat. Les économistes interrogés par Reuters prévoyaient en moyenne une stabilité des prix après une hausse de 0,1% en rythme annuel en août.
Le principal facteur expliquant le repli de septembre est une forte baisse, de 8,9%, des prix de l'énergie après -7,2% en août. Les prix des produits alimentaires non-transformés, eux, ont au contraire augmenté de 2,7% par rapport à septembre 2014.
En excluant ces deux composantes volatiles, l'inflation de base ressort à 0,9% sur un an en septembre, comme le mois précédent.
Les perspectives d'inflation à long terme sont au plus bas depuis février, soit avant le lancement par la BCE de son programme de rachat massif de dette du service public (assouplissement quantitatif, QE).
La banque centrale, qui achète dans le cadre de ce programme 60 milliards d'euros d'actifs par mois afin de stimuler les prix, reste très éloignée de son objectif à moyen terme d'une inflation légèrement inférieure à 2% en rythme annuel.
VERS UN RENFORCEMENT DU QE
Si des facteurs qui échappent au contrôle de la BCE, comme la panne de la croissance chinoise ou la chute des cours du pétrole, pèsent sur l'inflation en zone euro, certains économistes n'en mettent pas moins en doute la capacité de l'institution de Francfort de faire remonter les prix.
La BCE a laissé entendre début septembre qu'elle pourrait renforcer son soutien au crédit et à l'activité dans la zone euro pour tenir compte de perspectives assombries.
Pour la première fois, le président de l'institut d'émission, Mario Draghi, a alors clairement dit que le QE lancé en mars pourrait être prolongé au-delà de son terme prévu, soit septembre 2016, et que la banque centrale pourrait en modifier la taille ou la composition.
"Augmenter la taille des rachats mensuels aurait un plus grand impact que d'allonger la durée du programme actuel", écrit Deutsche Bank dans une note à sa clientèle.
"Les obstacles pour augmenter la taille des rachats risquent d'être importants, ce qui fait d'une extension du programme la voie la plus aisée", ajoute toutefois la banque.
Les signaux adressés récemment par les membres du Conseil des gouverneurs de la BCE laissent entendre qu'il n'y aura pas dé décision radicale concernant une modification du QE lors de sa prochaine réunion, le 22 octobre à Malte.
La BCE pourrait demander plus de temps pour évaluer les perspectives d'inflation et de croissance. Elle pourrait aussi attendre que la Réserve fédérale américaine relève ses taux d'intérêt pour la première fois depuis 2006, une initiative qui pourrait intervenir avant la fin de l'année.
"Avec la pression sous-jacente à la hausse que subit l'euro (...), le statu quo pourrait ne pas durer jusqu'à la fin de l'hiver et une avancée concernant le QE pourrait donc être dans les tuyaux en début d'année prochaine", prédit Erik Nielsen, économiste chez UniCredit.
(Patrick Vignal pour le service français)