MARSEILLE (Reuters) - Quatre corps, deux hommes et deux femmes, ont été retrouvés mardi sous les décombres des deux immeubles d'habitation mitoyens qui se sont effondrés la veille à Marseille, à l'heure où plusieurs personnes restent portées disparues, a-t-on appris auprès des autorités.
Dix bennes de gravats ont été dégagées pour tenter de retrouver la trace de survivants dans l'un des édifices détruits. Les secours se disent "inquiets mais optimistes" car des poches d'air dans lesquelles des personnes auraient pu se réfugier ont été mises au jour.
Le procureur de la République de Marseille, Xavier Tarabeux, a annoncé mardi matin la découverte d'un homme tué dans l'effondrement. Au fil de la journée, un deuxième corps, celui d'une femme, a été mis à jour, suivi de celui d'un homme.
Une deuxième femme sans vie a été découverte dans les décombres dans la soirée, a-t-on appris auprès des marins-pompiers et du procureur de la République.
Le magistrat avait fait état de "cinq à huit" personnes ensevelies après la découverte du premier corps, laissant redouter au moins une victime supplémentaire.
Les travaux de déblaiement devraient prendre "plusieurs jours", a précisé le ministre de l'Intérieur, Christophe Castaner, venu sur place.
Lors des questions au gouvernement à l'Assemblée, le ministre a annoncé avoir demandé au préfet de réaliser un audit de l'habitat indigne de la ville, qui compterait près de 6.000 propriétés "identifiées comme fragiles", soit près de 44.400 logements.
Les premières opérations se sont déroulées mécaniquement, elles sont menées désormais à la pelle. Au total, 80 marins-pompiers, aidés de chiens, et 120 policiers sont à pied d'oeuvre, a dit Christophe Castaner.
Interrogé auparavant sur France Bleu Provence, le ministre de l'Intérieur s'est dit "optimiste" sur le sort de deux passantes aperçues sur des images de vidéosurveillance peu avant l'effondrement. "Nous avons déblayé la rue où auraient dû se situer ces deux passantes si elles étaient décédées sur place lors de l'effondrement. Or nous n'avons trouvé aucun corps."
Deux personnes, a priori des passants, ont été légèrement blessées lundi lors de l'effondrement.
"LE TEMPS DES EXPLICATIONS VIENDRA"
"On a ensuite cinq habitants de cet immeuble qui ne répondent pas aux différents appels et peut-être trois personnes qui auraient été invitées sur le site et dont nous sommes sans nouvelles", a dit Christophe Castaner.
Les deux immeubles se trouvaient rue d'Aubagne, dans le 1er arrondissement de Marseille, au coeur de la ville. Fragilisé, un troisième édifice, préalablement évacué, s'est en grande partie écroulé à son tour.
L'intervention des secours est rendue particulièrement délicate par la "fragilisation des immeubles adjacents" et des conditions météo défavorables.
La mairie de Marseille a précisé dans un communiqué que l'un des deux immeubles avait été "muré et sécurisé afin d'en empêcher l'accès" tandis que le second avait "donné lieu à la réalisation de travaux de confortement permettant la réintégration des occupants".
Selon la municipalité, les fortes pluies qui se sont abattues sur Marseille ces derniers jours pourraient être à l'origine du sinistre.
"A Marseille, la catastrophe était non seulement prévisible, mais elle était prévue. L'indifférence aux pauvres est la cause de l'incurie des autorités de toutes sortes qui ont rendu possible le drame", déclare mardi dans un communiqué le député des Bouches-du-Rhône (La France insoumise) Jean-Luc Mélenchon, qui s'était rendu sur place la veille.
La vétusté des bâtiments a aussi été mise en cause par les habitants.
Un rapport sur la qualification du parc immobilier de Marseille, réalisé en mars 2015 à la demande de la ministre du Logement de l'époque Sylvia Pinel, faisait état de 42.000 logements présentant un risque pour la santé et la sécurité des habitants.
"Le moment n'est pas à la polémique sur ce sujet. Je sais qu'il y a de l'émotion, de l'inquiétude et de la colère. Le temps des explications viendra, toute la lumière sera faite", a promis Christophe Castaner.
"Le fléau que nous connaissons à Marseille comme partout, ce sont les marchands de sommeil qui font un pari du pourrissement de leurs immeubles. La loi existe, mais c'est un chantier de longue haleine", a souligné le ministre de l'Intérieur.
Une enquête a été confiée à la police judiciaire pour déterminer les circonstances exactes du sinistre.
(Jean-François Rosnoblet et Sophie Louet, édité par Yves Clarisse et Julie Carriat)