par James Regan
SYDNEY (Reuters) - Rio Tinto et BHP Billiton accumulent des actifs dans le cuivre avec pour objectif, semble-t-il, d'éliminer les producteurs moins rentables d'un marché mondial qui pèse 140 milliards de dollars (113 milliards d'euros), comme ils l'ont déjà fait sur le marché du minerai de fer.
Séparément ou en commun, Rio et BHP s'apprêtent à extraire des millions de tonnes supplémentaires de cuivre en dépit de la perspective d'une offre excédentaire sur le marché du cuivre dans les quelques années à venir.
"Pour les deux sociétés, il s'agit d'exercer l'influence maximum sur le marché mondial", souligne Gavin Wendt, analyste du secteur pour le cabinet d'étude basé à Sydney MineLife.
"Ceci dit, contrairement au marché du minerai de fer, clairement concentré sur un espace contrôlé par Rio et BHP, la Chine, les débouchés du cuivre sont beaucoup plus vastes, ce qui permet aux petits producteurs de rester dans la course", dit-il.
Plusieurs producteurs de taille plus modeste interrogés par Reuters ont refusé de commenter, estimant qu'il est trop tôt pour tenter d'évaluer l'impact de cette stratégie d'expansion.
L'idée que BHP et Rio travailleraient de concert pour acquérir le contrôle du marché du cuivre n'a jamais été évoquée.
Le Bureau of Resource and Energy Economics australien estime l'excédent d'offre dans le monde à 300.000 tonnes l'an prochain, équivalent à la moitié de la production annuelle de la Corée du Sud.
Le responsable de la division cuivre de Rio, Jean-Sébastien Jacques, a déclaré à des investisseurs ce mois-ci qu'un retour à une situation d'offre déficitaire était peu probable avant l'année 2018 et que le groupe cherchait pour le moment à "se donner un avantage clair" sur ses concurrents.
UNE INFLUENCE RENFORCÉE
BHP s'attend à une forte hausse de l'utilisation du cuivre au cours de la prochaine décennie, à la faveur du développement des sources d'énergie renouvelables qui requièrent des matériels richement dotés en cuivre. Ce métal a été déclaré comme étant l'un des piliers de croissance par le conseil d'administration de BHP.
"Le marché a été prudent dans l'ensemble pour 2015-2016, mais au-delà, la plupart des intervenants sont confiants sur l'avenir à long terme", note l'analyste d'UBS Daniel Morgan.
Il est peu probable que Rio et BHP puissent dominer le marché du cuivre aussi fermement que celui du minerai de fer, et Codelco, Glencore et Freeport McMoran devraient demeurer des acteurs importants du marché dans un avenir prévisible. Mais leur influence y sera renforcée.
La stratégie de production massive mise en place cette année visait à inonder le marché mondial du minerai de fer produit à bas coûts et de faire baisser les cours.
Le résultat dans le secteur du minerai de fer jusqu'à présent, où BHP et Rio contrôlent la moitié du marché par voie maritime, est d'avoir éliminé 125 millions de tonnes de capacités annuelles, soit un dixième de la demande mondiale, produite par des producteurs à coûts élevés.
La stratégie de BHP et Rio devrait leur donner l'avantage par rapport à leur grand concurrent Vale au Brésil, qui se concentre sur le minerai de fer au détriment du cuivre.
Dans des régions aussi variées que l'Amérique du Nord et du Sud, l'Australie et la Mongolie, BHP et Rio exploitent de nouvelles mines ou agrandissent des mines existantes, parfois à peu de frais et parfois par le biais de milliards de dollars.
Dans l'Arizona, le projet Resolution, détenu en commun par les deux géants miniers, pourrait à lui seul fournir 25% de la demande de cuivre des Etats-Unis pendant des décennies.
(Juliette Rouillon pour le service français, édité par wilfrid Exbrayat)