PARIS (Reuters) - Air France a annoncé mardi renoncer à son projet d'augmentation de 10% de sa flotte long-courrier d'ici 2020, en l'absence d'un accord avec ses pilotes, se contentant pour l'instant de prendre réception de ses premiers 787 de Boeing (NYSE:BA).
La compagnie aérienne tourne ainsi le dos aux propositions faites il y a moins de quatre mois, dans une volonté d'apaisement avec ses pilotes avec lesquels ses relations sont tendues depuis la grève de septembre 2014 contre un plan avorté de développement de sa compagnie à bas coûts, Transavia, hors de France.
A peine arrivé en fonctions, le nouveau directeur des ressources humaines d'Air France, Gilles Gateau, avait annoncé mi-janvier que la flotte long-courrier rattraperait en 2019 son niveau de 2014, refermant la parenthèse de son "plan B" de l'automne dernier qui prévoyait au contraire un recul de son activité.
Mais ces propositions étaient conditionnées à un accord que le Syndicat national des pilotes de ligne (SNPL), majoritaire, a refusé de signer avant la date butoir fixée lundi, dénonçant une remise en cause de ses règles de rémunération.
La direction, elle, souhaitait que les pilotes renoncent à une partie des hausses de salaires liées à l'augmentation prévue de leurs heures de vol afin d'aider à améliorer la compétitivité de la compagnie, voulant ainsi imiter les compagnies allemande Lufthansa (DE:LHAG) ou néerlandaise KLM.
"Le niveau de croissance et d'activité qui était proposé dans le projet d'accord (+10% en long courrier d'ici 2020) n'engage plus l'entreprise aujourd'hui car cet accord est maintenant caduc", a déclaré Gilles Gateau lors d'une conférence téléphonique.
Air France avait prévu de faire passer sa flotte long-courrier de 104 avions en 2017 à 107 en 2019, soit un niveau qui restait néanmoins inchangé par rapport à celui de 2014, avant d'atteindre 109 appareils en 2020.
"En revanche, on n'est pas dans le retour au plan B. Il y a une volonté d'aller de l'avant en termes de croissance", a ajouté l'ex-directeur de cabinet de Manuel Valls à l'issue du conseil d'administration sur les comptes trimestriels d'Air France-KLM, dont l'Etat français détient 17,6% du capital.
En attendant de retourner à la table des négociations avec ses pilotes, Air France compte sur les économies d'exploitation de ses nouveaux 787, moins gourmands en carburant que ses anciens A340.
ARRIVÉE DES 787 À PARTIR DE L'AUTOMNE
La compagnie réceptionnera son premier Boeing 787 à l'automne, pour une mise en service en janvier 2017, et recevra en avril 2017 le deuxième qu'elle commencera à exploiter au cours de l'été. Puis elle en intègrera quatre autres dans sa flotte jusqu'en avril 2018.
L'absence d'accord avec les pilotes s'accompagne d'une autre mesure collatérale : l'application à partir du 1er juin des ultimes mesures du plan "Transform 2015" qui n'était pas encore soldé pour les pilotes, au contraire des personnels au sol et des hôtesses et stewards.
Air France espère économiser 20 à 30 millions d'euros par an, en réduisant la rémunération des heures de vol de ses pilotes, notamment en ramenant la majoration des heures de nuit de 50% à 40%, a précisé Gilles Gateau.
Il a dit s'attendre à une contestation "sur le terrain juridique" de cette décision par les pilotes, comme cela avait déjà été le cas l'an passé.
Le SNPL, qui n'était pas immédiatement disponible pour commenter, avait accusé le 21 avril la direction d'Air France d'avoir retrouvé ses "vieux démons" en mettant sur la table un projet d'accord impossible à signer en l'état.
Air France-KLM a annoncé dimanche soir le maintien de Frédéric Gagey à la tête d'Air France, confirmant une information de Reuters.
Le groupe franco-néerlandais a apporté cette précision à l'occasion de l'annonce de la nomination de Jean-Marc Janaillac, le patron du spécialiste du transport multimodal Transdev, pour succéder d'ici au 31 juillet à Alexandre de Juniac au poste de PDG.
Des observateurs avaient estimé que le sort même de Frédéric Gagey, qui a peiné à gérer les relations tumultueuses d'Air France avec ses pilotes, pourrait se trouver remis en question, avançant le nom de Lionel Guérin, le patron de Hop! Air France, le pôle domestique de la compagnie, comme successeur potentiel.
(Cyril Altmeyer, édité par Juliette Rouillon)