par Deena Beasley et Manas Mishra
(Reuters) - Le principal conseiller de l'administration américaine sur les maladies infectieuses a déclaré mercredi que le remdesivir de Gilead (NASDAQ:GILD) Sciences allait devenir la norme de soin contre le COVID-19, des données préliminaires suggérant que l'antiviral expérimental permettait d'accélérer la guérison des patients.
Anthony Fauci a qualifié de "très significatifs" les premiers résultats d'un essai clinique effectué par le gouvernement américain, selon lesquels les patients recevant du remdesivir se rétablissaient 31% plus rapidement que ceux à qui était donné un placebo.
"Cela est vraiment très important. Ce sera la norme de soin", a-t-il dit devant les journalistes à la Maison blanche, dressant un parallèle avec 1986 et la quête d'un médicament contre le VIH.
La Food and Drug Administration (FDA), l'agence sanitaire américaine, a fait savoir qu'elle menait des discussions avec Gilead dans le but de rendre aussi vite que possible le remdesivir accessible aux patients. Elle a refusé de commenter un éventuel calendrier d'homologation du produit.
"Je veux qu'ils aillent aussi vite qu'ils le peuvent", a répondu Donald Trump à la question de savoir s'il voulait que la FDA accorde une autorisation en urgence pour le remdesivir. "Nous voulons que tout soit sûr, mais nous aimerions voir de très rapides autorisations, en particulier pour les choses qui fonctionnent", a ajouté le président américain.
Le remdesivir a suscité beaucoup d'espoirs dans la communauté scientifique et sur les marchés financiers ces dernières semaines alors que les études publiées dressaient un tableau mitigé de son efficacité. Fauci a prévenu que les dernières données devaient encore être analysées.
L'action Gilead gagnait mercredi plus de 5% sur le marché boursier américain Nasdaq et les informations données par le laboratoire contribuaient à la hausse de l'ensemble de Wall Street.
Le groupe pharmaceutique américain avait fait savoir ce mois-ci qu'il était disposé à donner aux hôpitaux ses stocks actuels de remdesivir, soit 1,5 million de doses - une quantité suffisante pour soigner plus de 140.000 patients en fonction de la durée du traitement. L'approbation de la FDA permettrait aussi d'ouvrir la voie à une commercialisation du produit.
LUEUR D'ESPOIR
Le National Institute of Allergy and Infectious Diseases (NIAID) américain a déclaré que les résultats préliminaires de ses essais menés en double aveugle sur 1.063 patients montraient que les patients hospitalisés à cause du COVID-19 guérissaient en 11 jours avec un traitement au remdesivir, contre 15 jours pour le groupe de patients recevant un placebo.
Cette étude montre aussi une tendance indiquant un taux de survie plus important lorsque le remdesivir est utilisé - 8% des patients ayant reçu le traitement sont décédés, contre 11,6% des patients du "groupe placebo". L'écart n'est cependant pas suffisamment important d'un point de vue statistique pour conclure qu'il est dû au remdesivir.
En dépit de l'effervescence, un chercheur du Wilson Center, à Washington, a dit ne pas vouloir se réjouir trop vite. Les nouvelles données "offrent une lueur d'espoir" que le remdesivir a un effet contre le COVID-19, a dit Lawrence Altman, mais des analyses scientifiques supplémentaires sont nécessaires pour les "comparer avec d'autres études qui ont montré des résultats mitigés".
Gilead a donné des informations sur un autre essai qu'il a mené lui-même dans plusieurs dizaines d'établissements hospitaliers mais qui ne vise pas à mesurer l'efficacité du remdesivir par rapport à un placebo.
Dans cet essai, a dit le groupe, 62% des patients traités au début de la maladie ont pu sortir de l'hôpital, contre 49% de ceux qui ont été traités à un stade plus avancé.
L'étude portait sur 397 patients et visait à évaluer l'efficacité et l'innocuité de la molécule lors de cures de cinq et dix jours chez des patients hospitalisés présentant des symptômes graves du COVID-19.
"L'étude démontre l'intérêt, pour certains patients, d'un traitement de cinq jours, ce qui pourrait augmenter nettement le nombre de patients susceptibles d'être traités avec l'offre actuelle de remdesivir", a déclaré Merdad Parsey, directeur médical de Gilead Sciences, dans un communiqué.
Le remdesivir, qui a échoué dans des essais de traitement du virus Ebola, est testé contre le SARS-CoV-2 car il est conçu pour désactiver le mécanisme qui permet à certains virus, dont le nouveau coronavirus, de se multiplier et donc potentiellement de submerger le système immunitaire.
(avec Steve Holland à Washington; version française Marc Angrand et Jean Terzian)