Pour la Bourse de Paris, 2014 sera un des meilleurs crus depuis des années pour les entrées en Bourse, mais le rythme effréné du premier semestre sera difficile à tenir et le marché pourrait devenir plus sélectif.
"Le bilan est très positif pour le premier semestre. La cloche sonne pratiquement tous les jours à Paris ou sur nos autres marchés", s'enthousiasme Marc Lefèvre, responsable des cotations pour l'Europe de l'opérateur boursier Euronext, qui chapeaute les Bourses de Paris, Amsterdam, Bruxelles et Lisbonne.
Les introductions en Bourse se multiplient ces derniers mois à Paris, à un rythme quasiment jamais vu depuis la création d'Euronext au début des années 2000 et 2014 sera la meilleure année depuis 2007 en France.
Plusieurs grands noms se sont succédé sur le marché parisien, à commencer par Numericable et Tarkett fin 2013, puis en 2014, GTT, Coface, Elior, Euronext ou Worldline, soit des transactions à plus de 800 millions d'euros.
Signe de cette frénésie, pour la seule journée du 27 juin, Euronext a enregistré trois transactions, deux à Paris et une à Amsterdam, totalisant environ 2 milliards d'euros.
Au total, 4 milliards d'euros ont été levés en France à fin juin, contre 1,3 milliard pour la seule année 2013.
"Le changement par rapport aux années précédentes est que la fenêtre est durablement ouverte depuis neuf mois", relève M. Lefèvre.
Comme toujours plusieurs facteurs expliquent cet enthousiasme, le premier tenant aux politiques monétaires généreuses menées par les grandes banques centrales, poussant les investisseurs à prendre plus de risque en se tournant vers les actions.
La hausse des indices boursiers et la faible volatilité qui en découlent ont permis aux entreprises voulant se faire coter de passer à l'action, espérant une bonne valorisation.
- Risque d'embouteillage ? -
Sans parler de l'aspect psychologique, qui pousse les entreprises à s’engouffrer dans la brèche pour ne pas rater l'occasion, ce qui peut même créer un peu d'embouteillage.
"Voyant le marché bien orienté, tout le monde a voulu saisir la fenêtre avant l'été"", signale Michael Maringe, responsable des introductions en Bourse pour la France chez Société Générale.
Conséquence directe, le marché atteint "la limite physique des investisseurs qui n'ont pas toujours les ressources internes pour étudier tous les dossiers et doivent donc faire des choix"", selon le banquier, qui note que c'est assez inhabituel.
C'est la raison pour laquelle, sans pour autant rater leurs introductions en Bourse, certaines sociétés ont dû faire un effort sur le prix, qui peut ressortir dans le bas des objectifs visés, comme pour Elior, Euronext, Worldline ou encore Viadeo.
"L'effet du choix disponible fait que les investisseurs sont plus sélectifs", estime M. Maringe. Et ils devraient le rester au second semestre, même si les conditions sont toujours favorables.
"Pour le reste de l'année, nous sommes optimistes, car l’ afflux de liquidités sur la classe actions reste considérable, ce qui permettra de belles introductions en Bourse à venir", selon M. Lefèvre.
Un grand nombre de PME devraient franchir le pas sur les marchés d'Euronext d'ici la fin de l'année, ainsi que quelques grandes entreprises, avec potentiellement le groupe d'ingénierie électrique Spie, le spécialiste des laboratoires d'analyses médicales Labco ou encore le loueur de voitures Europcar.
"Le premier semestre a été positif mais je suis un peu plus modéré pour le reste de l'année. Les opérations du premier semestre étaient pour beaucoup des opérations de rattrapage", relève Philippe Kubisa, associé chez PricewaterhouseCoopers (PwC), spécialisé dans le marchés de capitaux.
Il explique que le contexte macroéconomique va être très important, d'autant que le CAC 40 se fait plus hésitant, ajoutant que "les performances post-opération ne sont pas non plus fantastiques", ce qui n'est pas de nature à encourager les investisseurs.
"Pour les prochains mois, on pourrait revenir dans un marché qui va être plus sain, où, du coup il faudra positionner les fourchettes de prix en écoutant les retours du marché", explique M. Maringe.
Quoiqu'il en soit, selon lui, "il est peut-être souhaitable de ne pas avoir un agenda aussi chargé que pour le mois de juin qui a été absolument exceptionnel".