Porte-étendard de la fast-food branchée, la chaîne de burritos et tacos Chipotle est engluée dans un scandale sanitaire aux Etats-Unis, qui menace sa success story et ses efforts pour s'imposer dans les bonnes adresses des jeunes urbains.
Depuis plus d'un mois, l'enseigne fait régulièrement la une de la presse économique américaine qui tient la chronique de l'épidémie de gastroentérite due à la bactérie pathogène E.coli. Plus d'une cinquantaine de clients de Chipotle auraient été touchés.
Le dernier épisode en date concerne une infection apparemment moins grave qui a frappé plus d'une centaine d'étudiants de l'Université de Boston après un repas chez Chipotle, selon un porte-parole de l'établissement. Le restaurant a été fermé, des tests sont en cours et s'orientent sur la piste d'une contamination de la nourriture par un employé malade.
L'épidémie d'E.coli est, elle, partie en octobre des Etats de l'Oregon et de Washington (nord-ouest) où la chaîne de fast-food a dû fermer provisoirement 43 restaurants après le signalement de premiers cas. Elle s'est, depuis, étendue à sept autre Etats dont la Californie et New York, selon les Centres de contrôle et de prévention des maladies (CDC).
Les autorités sanitaires ne sont toujours pas parvenues à identifier l'ingrédient responsable et aucun décès n'a été recensé.
- "Regrettable" -
"C'est un regrettable incident et j'en suis profondément désolé", s'est excusé jeudi le fondateur et copatron Steve Ells dans une interview à la chaîne de télévision américaine NBC. "Les procédures que nous sommes en train de mettre en place sont au-dessus de ce qui se fait dans l'industrie et vont faire de nous le lieu le plus sûr où manger", a-t-il ajouté.
Chipotle, qui affirme qu'aucun nouveau cas d'E.coli n'a été recensé depuis le 7 novembre, prévoit de lancer une grande campagne publicitaire pour promouvoir les actions mises en oeuvre afin de garantir la qualité de ses aliments.
L'infection à la bactérie E.coli provoque des diarrhées parfois hémorragiques, des crampes abdominales et des vomissements, qui passent en général sous dix jours. Dans de rares cas, chez les personnes âgées ou les enfants, elle peut entraîner des insuffisances rénales voire des décès.
"Cet incident a déjà eu un impact négatif sur nos résultats financiers et opérationnels", reconnaît l'entreprise dans un document adressé au gendarme des marchés financiers, la SEC.
En Bourse, le titre a plongé de plus de 15% en un mois. Les ventes ont chuté de 16% en novembre et le plongeon devrait se poursuivre en décembre et début 2016. Les objectifs financiers 2015 ont été fortement abaissées.
Chipotle, qui séduit une population jeune et urbaine, n'a toutefois pas l'intention de ralentir ou de suspendre ses ouvertures de magasins, affirme à l'AFP Chris Arnold, un porte-parole.
La facture de la gestion de la crise s'élève pour l'instant de 6 à 8 millions de dollars, indique Chipotle. A ces coûts vont s'ajouter des frais juridiques qui restent à évaluer.
"Est-ce la fin de la croissance insolente (du groupe)?", s'interroge le cabinet d'analystes Trefis, qui prévoit une nette baisse de la fréquentation des restaurants.
Etoile montante jusqu'au début de l'automne, Chipotle a encore les faveurs des experts qui estiment toutefois qu'il va falloir du temps pour réparer son image au moment où les Américains portent une attention accrue au contenu de leurs assiettes.
L'enseigne, fondée en 1993 à Denver (Colorado, ouest) et propriétaire de 1.850 restaurants aux Etats-Unis, au Canada, en France, au Royaume-Uni et en Allemagne, s'est forgée une réputation de groupe "éco-responsable", ce qui lui a permis de gagner rapidement des parts de marché malgré des prix plus élevés que ses concurrents (McDonald's, Taco Bell...).
Elle a renoncé par exemple à utiliser des OGM et des viandes d'animaux élevés aux antibiotiques. Son art du marketing et de la promotion lui a valu d'être distingué pour des films d'animation en faveur de l'agriculture responsable.
Chipotle a également produit sa propre série, "Farmed and dangerous", qui dépeint de manière assez caricaturale mais avec humour les excès de l'agriculture productiviste.