Le numéro un de la CGT Philippe Martinez n'a pas "l'obsession de la première place" pour sa confédération mais aimerait qu'elle s'adresse "à tous les salariés". Et il tient beaucoup à sa semaine de 32 heures pour faire baisser le chômage, quitte à passer pour un "illuminé".
Elu en février 2015 secrétaire général de la confédération dans un contexte "particulièrement difficile", juste après l'éviction de Thierry Lepaon épinglé pour son train de vie, il se crispe et se montre peu disert quand on évoque son prédécesseur.
M. Martinez et les militants CGT ont été "marqués et choqués" dès les premières révélations sur le montant des travaux des bureau et appartement de fonction de Thierry Lepaon (pour un montant total d'environ 160.000 euros), raconte-t-il à une journaliste de l'AFP, installé dans ledit bureau beau et spacieux, situé au siège de la confédération, à Montreuil.
"L'image de la CGT a été mise à mal", ajoute-t-il. "Les militants ont été attaqués sur leur intégrité. Ca a renvoyé l'image de militants malhonnêtes, et ça a fait mal", regrette-t-il.
Pour autant, la CGT s'est engagée à payer l'ancien leader, jusqu'à ce qu'il trouve un emploi. La presse évoque sa nomination à la tête d'une agence gouvernementale pour la langue française. M. Martinez évacue la question: "c'est l'Élysée ou Matignon qui a la main dessus, pas moi". Mais il en profite pour souligner les "compétences et expertise" de l'ex-leader en la matière, rappelant qu'il a travaillé sur un rapport sur l’illettrisme.
- 'Faire tourner le monde dans le bon sens ' -
M. Martinez veut surtout oublier ce scandale Lepaon et aller de l'avant, alors que la CFDT pourrait ravir la première place à la CGT lors des élections professionnelles nationales qui auront lieu en 2017.
"On n'est pas obnubilé par cette histoire de représentativité. On n'a pas l'obsession de la première place, mais l'obsession d'être le syndicat de tout le salariat", assure-t-il.
"Il y a des entreprises de 1.000 salariés où on n'est pas du tout présent". En outre, "il faut que le syndicat soit aussi abordable pour les précaires, les intérimaires, les jeunes. On a de vrais efforts à faire dans ce domaine".
Il veut aussi que la confédération "accorde plus de temps aux salariés" et moins aux réunions institutionnelles ("il y a beaucoup de réunions avec le gouvernement, les directions d'entreprise où il ne se passe pas grand-chose").
M. Martinez insistera sur ces points lors du Congrès qui démarre lundi à Marseille.
Il y vantera également une CGT qui "conteste" mais aussi qui "propose" car "il y a un manque de visibilité d'une CGT force de proposition".
Et parmi les propositions, il y a la semaine de 32 heures, son cheval de bataille: "la vie moderne n'implique pas une aliénation au travail, qui doit être émancipateur mais pas une contrainte. On peut s'éclater au boulot et dans la vie. Il faut un équilibre".
"Quand on a proposé de réduire le temps de travail, ça a fait l'effet d'une bombe", s'amuse-t-il. Mais, "petit à petit, on est sollicité par les économistes, par les sociétés qui estiment que c'est une proposition intéressante".
La logique est simple: "si on travaille moins tous, on va libérer du temps pour ceux qui n'ont pas de travail". Et le financement? "C'est la question la plus difficile". Mais il a des solutions: "prendre sur l'argent versé aux actionnaires"; "récupérer" celui de l'évasion fiscale.
"On est un peu à contre-courant, avec un peu l'image d'illuminé hors monde dans lequel on vit. Nous on considère que le monde dans lequel on vit ne tourne pas rond et donc on fait des propositions pour le faire tourner dans le bon sens", explique-t-il.