Sur l'île norvégienne d'Hitra, des saumons d'élevage moins nocifs pour l'océan

Publié le 26/09/2016 16:18
En Norvège, dans la paisible baie d'Hitra, ici le 22 septembre 2016, l'entreprise Leroy cherche à réduire l'impact de l'élevage de saumons sur l'environnement (Photo Céline SERRAT. AFP)

En Norvège, dans la paisible baie d'Hitra, ici le 22 septembre 2016, l'entreprise Leroy cherche à réduire l'impact de l'élevage de saumons sur l'environnement (Photo Céline SERRAT. AFP)

Une quinzaine d'immenses filets circulaires flottent dans la paisible baie d'Hitra, une île sur la façade ouest de la Norvège: chacun renferme quelque 120.000 saumons élevés en tentant de minimiser les multiples impacts sur la nature de la florissante aquaculture nationale.

"On ne peut pas dire qu'avec un million de tonnes de poissons produits dans le pays, il n'y a pas d'impact", convient Henri Lapeyrère, responsable du marché français pour l'entreprise de production Leroy, lors d'une visite d'un site d'élevage avec les équipes du WWF.

Comme toute l'aquaculture, l'élevage de saumons a des conséquences sur l'environnement: développement de parasites, dispersion de traitements (chimiques et antibiotiques) dans l'eau de mer, concentration de déjections, consommation de poissons de fourrage, fuite de saumons d'élevage dans l'océan...

La Norvège, qui a su pleinement profiter de l'engouement pour le saumon de l'Atlantique, est le premier producteur mondial de cette espèce, le "salmo salar".

Sur une production mondiale de 2,3 millions de tonnes, elle "produit 1,2 million de tonnes, dont 95% sont exportés", indique Karoline Andaur de WWF Norvège. Un chiffre multiplié par deux entre 2005 et 2014. L'ONG souhaiterait d'ailleurs que les producteurs norvégiens s'en tiennent là et "améliorent leurs pratiques avant de grossir davantage".

Sous la pression d'ONG et de consommateurs plus exigeants, certains adoptent déjà des pratiques plus durables.

"La société Leroy est parvenue à un impact limité, bien maîtrisé", assure Henri Lapeyrère.

A bord de la plateforme flottante regroupant une salle de contrôle informatisée, des cales chargées de tonnes de farines animales et végétales et une confortable pièce à vivre pour le personnel, le responsable de la ferme, Ole Eskerod, explique: "les poissons sont là depuis un an, ils pesaient une centaine de grammes en arrivant et avoisinent aujourd'hui les trois kilos. D'ici décembre ou janvier, ils feront 5-6 kg et pourront être abattus".

- Label pour 'verdir' les pratiques -

"Cette ferme de Leroy a les meilleures pratiques qu'on peut exiger aujourd'hui", confirme Selim Azzi, responsable pêche durable au WWF France. "Ce qui ne doit pas éluder l'impact des fuites de poissons, le problème persistant des poux de mer (des parasites) et les conséquences sur les fonds marins", s'empresse-t-il d'ajouter.

A la surface des filets géants, les saumons font d'interminables concours de saut: "ils ne sont pas les uns sur les autres, les filets font 50 mètres de diamètre et 30 mètres de profondeur", se félicite Henri Lapeyrère. En conformité avec les 97% d'eau pour 3% de poissons exigés par le gouvernement norvégien.

Comme d'autres producteurs norvégiens (Marine Harvest, SalMar, Cermaq, Norway Royal Salmon, etc), Leroy va au-delà de la réglementation nationale en répondant aux exigences du label délivré par Aquaculture stewarship council (ASC).

Part limitée de protéines animales dans la nourriture, traçabilité des farines et huiles végétales, réduction des traitements, limitation du taux de mortalité, de phosphate dans l'eau... Les critères sont nombreux "mais à la portée des producteurs", affirme Barbara Panker, du label ASC.

L'industrie a encore du chemin à faire: "30% des élevages norvégiens sont ASC", précise-telle.

"Grâce aux vaccins que nous administrons à chaque saumon, nous n'utilisons quasiment plus d'antibiotiques", explique Henri Lapeyrère.

Dans un souci de préservation des ressources, "nous avons considérablement réduit les ingrédients d'origine marine - petits poissons réduits en farine - dans la nourriture", poursuit l'éleveur. "Aujourd'hui, 65% des ingrédients sont d'origine végétale (soja et huile de palme notamment). Il y a 10-15 ans, c'était l'inverse".

Selon Barbara Panker, "la maitrise du développement des poux de mer est le plus difficile pour les industriels".

Pour lutter contre ce parasite, "le diflubenzuron est interdit par l'ASC", se félicite Selim Azzi, "alors que la Norvège le tolère". A la place de cet insecticide, interdit dans l'Union européenne, de petits poissons "nettoyeurs" sont utilisés. Un traitement chimique peut exceptionnellement être appliqué.

"Le label donne de la crédibilité à nos pratiques", confie Henri Lapeyrère, dont l'entreprise a 20% de ses sites certifiés et vise les 100% en 2020. Un impératif économique car "en Allemagne, en Suisse et aux Pays-Bas, la demande pour les produits labellisés ASC est déjà très forte".

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