Touchés de plein fouet par la crise, les architectes s'inquiètent pour leur avenir

Publié le 17/02/2016 07:30
Le nouveau palais de justice de la zone de développement urbain Clichy-Batignolles en cours de construction dans le nord-ouest de Paris, le 21 janvier 2016 (Photo KENZO TRIBOUILLARD. AFP)

Le nouveau palais de justice de la zone de développement urbain Clichy-Batignolles en cours de construction dans le nord-ouest de Paris, le 21 janvier 2016 (Photo KENZO TRIBOUILLARD. AFP)

La polémique née de l'appel à projets innovants "Réinventer Paris" révèle les difficultés rencontrées aujourd'hui par les architectes, une profession paupérisée par la crise et inquiète pour son avenir.

En 2013, un architecte sur quatre était en "grande difficulté économique" avec des revenus mensuels à peine supérieurs à 500 euros, révélait l'étude Archigraphie, publiée par le Conseil national de l'ordre des architectes (Cnoa) il y a un an. Et 75% d'entre eux n'atteignaient pas le revenu moyen des architectes, soit 3.779 euros.

"La profession se trouve dans une situation économique extrêmement difficile: la commande et les taux d'honoraires ont beaucoup baissé, aussi bien en marché public qu'en marché privé", constate la présidente du Cnoa, Catherine Jacquot.

"Après six ans d'études, nos jeunes diplômés sont contraints de se mettre en autoentrepreneurs avec des honoraires très bas, parce que les agences n'arrivent pas à les embaucher comme salariés", dit-elle à l'AFP.

Ces derniers jours, Mme Jacquot a dénoncé publiquement les modalités de l'appel à projets "Réinventer Paris" lancé par l'édile Anne Hidalgo, dans le cadre duquel la plupart des 75 équipes finalistes, ont travaillé sans rémunération, selon elle.

Elle accuse la Ville de Paris d'avoir fait preuve de "cynisme" en n'imposant pas aux promoteurs de rémunérer les architectes qu'ils ont fait travailler alors que, dans un concours classique, les finalistes se voient rembourser 80% de leurs frais.

Selon les calculs d'un professionnel souhaitant rester anonyme, les agences candidates ont déboursé 75.000 à 90.000 euros.

"Ceux qui ont perdu de l'argent ne veulent pas parler. C'est très mal vu de dire qu'on est en difficulté: plus personne ne prend le risque de travailler avec vous", dit-il à l'AFP.

De son côté, la municipalité parisienne estime que les architectes ont pu "définir avec les promoteurs les modalités de leur rémunération".

"Mais excepté quelques agences, la plupart des architectes n'ont pas les moyens de refuser un travail !", rétorque Mme Jacquot. "Avec la crise, le rapport de forces leur est très défavorable".

Dans ce contexte, "lorsque la ville lance une consultation sur des terrains publics, le moins qu'elle puisse faire c'est de mettre en place des procédures vertueuses", dit-elle.

- "Longueur de la consultation" -

Pour la présidente du Cnoa, "on est en train d'asphyxier cette profession, au moment où les agences doivent investir dans la recherche, développer de nouvelles façons de travailler dans le cadre de la transition écologique et numérique".

Lauréat de "Réinventer Paris" avec son projet Stream Building sur le site de Clichy-Batignolles - pour lequel il a été rémunéré par la foncière Eurosic -, l'architecte Philippe Chiambaretta estime à l'inverse qu'il "ne faut pas jeter le bébé avec l'eau du bain".

Pour lui, Réinventer Paris "a obligé les gens à rentrer dans une démarche innovante: il y aura un +avant+ et un +après+", dit-il à l'AFP.

"L'intérêt intellectuel du programme a été considérable, l'investisseur nous a donné carte blanche pour concevoir l'architecture, définir le programme, son modèle économique, les exploitants partenaires"

"J'ai un seul reproche: la longueur de la consultation", dit M. Chiambaretta, car les projets, souvent des réhabilitations complexes de bâtiments, ont nécessité un "niveau de travail considérable".

Au sein de son agence PCA, le projet a occupé une personne à temps plein pendant huit mois, et "quatre à cinq sur les deux derniers mois", soit un coût de 100.000 euros hors taxes.

A l'ordre des architectes, on redoute de voir d'autres grandes métropoles emboîter le pas à la capitale, alors que "Réinventer la Seine" sera lancé en mars, associant Paris, Rouen et Le Havre pour réaménager les berges du fleuve.

"Nous proposons à la Ville de Paris de travailler avec eux pour mettre en place un guide de bonnes pratiques. Les promoteurs n'y trouveront rien à redire", estime sa présidente.

Les architectes espèrent aussi que le projet de loi Création, architecture, patrimoine débattu cette semaine au Sénat, améliorera la qualité de "l'architecture du quotidien".

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