Les constructeurs d'avions d'affaires, réunis en Suisse du 21 au 23 mai au salon Ebace, peinent à retrouver le faste des années 2005-2008 mais l'avenir du marché reste prometteur grâce à l'accroissement des multi-millionnaires dans les pays émergents.
"La véritable reprise se fait attendre", résume Eric Trappier, PDG de Dassault Aviation, qui produit les luxueux Falcon dont trois exemplaires --le 2000S, le 900LX et le 7X-- seront exposés sur le tarmac à Genève.
En 2012, le groupe français, qui détient 16,6% de parts de marché (selon le cabinet d'études américain Teal Group), a vendu 58 jets, contre 36 en 2011, sans retrouver le niveau d'activité de 2008 (66 livraisons en 2012 contre 72 en 2008). "Et, à l'issue du premier trimestre écoulé, la tendance ne se révèle pas très différente pour l'exercice 2013", constate le dirigeant.
Les livraisons de jets d'affaires ont seulement augmenté de 4% au premier trimestre, estime en effet l'association Gama qui regroupe les constructeurs.
Le secteur, évalué à 13 milliards de dollars, s'est effondré de 29,2% entre 2008 et 2012, indique Teal Group qui table sur une croissance de 11% cette année, tirée par la montée en cadence de livraisons du Gulfstream 650, le jet d'affaires bi-moteur le plus cher du monde (plus de 60 millions de dollars) fabriqué par l'américain Gulfstream (General Dynamics).
Il prévoit ensuite quatre années de hausse d'environ 12%.
"Malheureusement, avec ce taux de croissance, nous ne reviendrons pas au pic de livraisons de 2008 avant 2015", commente Richard Aboulafia, vice-président du cabinet. Car tous les éléments ne sont pas encore réunis pour une véritable embellie.
Sur le marché d'occasion, "le nombre de transactions est en augmentation mais à des niveaux de prix encore faibles, en particulier pour les modèles hors production", explique Eric Trappier.
En outre, les marchés de référence, les Etats-Unis en particulier restent "très attentistes", dit-il. Or le marché américain reste "le poumon de l'aviation d'affaires en dépit d'un secteur qui s'est mondialisé".
Les deux tiers de la flotte des avions en service (quelque 12.000) sont situés en Amérique du Nord "bien que les constructeurs livrent aujourd'hui une beaucoup plus grande proportion d'avions dans le reste du monde", remarque M. Trappier.
Pour autant, Ernie Edwards, président de la branche aviation d'affaires du brésilien Embraer, estime qu'il y a des raisons d'être optimistes.
"Les bénéfices des entreprises américaines (indicateur clé pour l'aviation d'affaires) sont à des niveaux record", commente-t-il.
La faible activité constatée en Europe est, en outre, compensée par le Moyen-Orient, la Chine et l'Afrique.
En Chine, 3.000 personnes détiennent plus de 500 millions de dollars et on y compte 130 milliardaires, indique Teal Group.
"Seuls quelque 150 jets d'affaires étaient enregistrés en Chine début 2011 contre plus de 10.000 aux Etats-Unis. Ils n'étaient que (...) quelques dizaines en 2006", rappelle M. Aboulafia.
Bombardier, leader du secteur avec 30,9%, estimait l'an passé que 2.360 jets d'affaires seront livrés en Chine d'ici 2030.
Même en Europe, il y a des "poches de croissance", souligne par ailleurs Marine Eugène, directrice des ventes en Europe de la compagnie NetJets. "On constate une effervescence dans la City de Londres. Notre clientèle londonienne reprend confiance. En mode silence les trois dernières années, elle est très active en ce moment".
Selon elle, Ebace devrait être "beaucoup plus positif cette année".
Et la vedette sera sans aucun doute, le Legacy 500, le tout nouveau jet du segment intermédiaire d'Embraer. Il devait se poser samedi pour la première fois hors du Brésil.
"Le Legacy doit entrer en service mi-2014. (...) Nous disposons désormais de trois prototypes pour la campagne de certification. La réussite est remarquable en si peu de temps puisque le premier vol s'est déroulé le 27 novembre", estime Ernie Edwards.