Les dirigeants de pays européens, de la Turquie, et le président de la Commission européenne José Manuel Barroso, étaient réunis lundi à Ankara pour le lancement du projet de gazoduc Nabucco, qui permettra à l'Europe de réduire sa dépendance de la Russie.
Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan devait participer en fin de matinée à la cérémonie de signature de l'accord, en présence des Premiers ministres de l'Autriche, de la Bulgarie, de la Hongrie, de la Roumanie.
Le projet Nabucco prévoit la construction d'un gazoduc pour transporter graduellement jusqu'à 31 milliards de m3 de gaz par an en provenance d'Asie centrale notamment vers l'UE, en passant par la Turquie et le sud-est de l'Europe.
Le Premier ministre irakien Nouri al-Maliki, le président géorgien Mikheïl Saakachvili, un représentant de l'Azerbaïdjan, et l'émissaire spécial américain pour l'énergie en Eurasie, Richard Morningstar avaient fait le déplacement.
La Géorgie est un des points de connexion possibles du gazoduc, avec l'Irak et la Syrie. L'Azerbaïdjan doit fournir une part importante du gaz transporté par Nabucco.
Un quart du gaz naturel utilisé en Europe provient actuellement de Russie. Un différend entre la Russie et l'Ukraine, point de transit essentiel, a déjà gravement porté atteinte aux approvisionnements vers l'Europe.
Nabucco, lancé en 2002, devrait entrer en service en 2014. Son coût est estimé à 7,9 milliards d'euros. Deux banques européennes se sont déclarées prêtes à financer le projet, mais les analystes ont émis des doutes quant à la capacité de réunir les fonds suffisants, du fait de la crise.
La signature de l'accord "est un résultat très significatif... (mais) il faut reconnaître qu'il y a encore beaucoup de travail à faire", a déclaré M. Morningstar à la presse avant la signature.
Le Turkménistan, qui dispose d'importants gisements de gaz et, qui, jusqu'àlors ne s'était pas prononcé formellement sur sa participation au projet, a apporté un précieux soutien à Nabucco vendredi, en annonçant être prêt à s'associer au projet.
Le Turkménistan a des réserves estimées à 3 milliards de M3 et peut approvisionner Nabucco pendant 30 ans.
Les Européens attendent encore l'accord de pays-clés comme le Kazakhstan ou l'Ouzbékistan.
L'Azerbaïdjan sera un des principaux fournisseurs, mais n'a pas assez de gaz pour remplir seul le tube, avec une capacité de fourniture estimée à environ 4 mds de m3 par an, dans un premier temps.
Bakou et Moscou viennent par ailleurs de signer un accord pour l'achat de gaz azerbaïdjanais à partir de 2010 mais, affirme Ankara, celui-ci ne devrait pas affecter le projet Nabucco.
Le projet Nabucco est en concurrence avec un autre projet de gazoduc, South Stream, développé par le géant russe Gazprom et l'italien ENI qui doit relier la Russie à la Bulgarie, par la mer Noire.
Nabucco acheminera du gaz d'est vers l'ouest et, selon l'accord, d'ouest vers est, a expliqué le Commissaire européen à l'énergie Andris Piebalgs au journal turc Hürriyet Daily News.
Cette disposition technique "permettra de fournir du gaz à la Turquie en cas de crise" à partir du réseau européen, a-t-il précisé.
La signature de l'accord sur Nabucco a été reportée à plusieurs reprises, la Turquie, pays pauvre en énergie, exigeant 15 % du gaz transporté par le tube, pour satisfaire ses propres besoins.
Ankara a finalement renoncé à cette demande, mais espère pouvoir recueillir entre 50 et 60% des revenus des taxes, soit environ 400 à 450 millions d'euros par an, voire davantage (560 à 630 millions de dollars).